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CHARLOT S’AMUSE

qui, parfois, le tordait, et se sentant ressaisi d’une salutaire terreur à la pensée de l’effroyable châtiment, tout moral, qui punirait désormais ses défaillances. Sa foi, pour alanguie quelle fût, n’était point ébranlée et le petit malheureux tremblait à l’idée de sortir de son bienheureux état de grâce. Il était conscient maintenant et il souffrait, brisé de cette lutte quotidienne avec lui-même. Mlle  de Closberry le vit pâlir ; prise d’inquiétude, elle lui donna du chocolat le matin. C’est alors qu’il fit la connaissance d’un de ses petits voisins, Lucien Leroy.

Lucien était orphelin. Lorrain par son père et méridional par sa mère, il avait les qualités des deux races. Son oncle l’avait recueilli, mais bornait sa tutelle à nourrir et à loger son neveu. Le gamin avait donc poussé au hasard, à la diable, aimé de tous, et se tirant toujours d’affaire, grâce à une intelligence remarquable hâtivement développée. Il était plus âgé d’un an que Charlot, mais semblait de beaucoup son aîné. Cependant, ils se recherchèrent et, se connaissant à peine, frayèrent vite, comme se devinant. Le petit Vosgien avait été flatté de fréquenter, grâce au voisinage, le Parisien que sa protectrice ne laissait se lier avec personne à l’école, celui que tout le monde proté-