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CHARLOT S’AMUSE

tordant dans l’exacerbation aiguë de ses accès en retard.

Une heure après cette crise, il se rendait au Recrutement. Son parti était arrêté : il allait s’engager, quitter l’abominable ville, rejoindre son ami Lucien. En ouvrant la porte du bureau militaire, il souriait, s’étonnant de n’avoir pas pensé à cela plus tôt, ne réfléchissant pas autrement d’ailleurs à la gravité de sa subite détermination. Repris de ses anciennes rêveries, il se voyait déjà en uniforme, menant la vie libre de garnison avec son vieux camarade, s’embarquant, toujours avec lui, pour une colonie lointaine, et, peut-être, au retour, atteignant l’épaulette. Il était incapable, pour l’instant, de songer à autre chose qu’à son voyage, son arrivée et son futur équipement. Sa cervelle de linotte ne sortait pas de ces trois conséquences de la décision qu’il venait de prendre. Au fond, avec cela, peut-être était-il envahi de la griserie du moment ? Les souvenirs de la guerre étaient encore vivants à cette époque où l’on parlait partout, surtout dans l’Est, de la réorganisation de l’armée, des devoirs et de l’avenir réservés aux jeunes. Charlot se remémorait confusément toutes les conversations patriotiques qu’il avait entendues, et un vague enthousiasme, dont il était