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CHARLOT S’AMUSE

corsage aplati dont le bas se perdait avant la bordure dédorée du cadre, comme noyé par les pâles reflets du linceul qui dessinait sous ses plis roides, atrocement immobiles, la tête et la poitrine du cadavre.

Fini, c’était fini ! tout ! et, s’arrachant au lit funèbre, elle tordait ses cheveux gris, coupant ses cris de hoquets, horrible et belle, tragiquement ridicule, navrante, à faire taire le dégoût.

— Allons, mère Duclos ! du courage… Faut se faire une raison, pardi !

Les voisines entraient, la prenaient sous le bras, et l’une d’elles lui versait un petit verre de vulnéraire ou d’arquebuse, tandis que les autres aspergeaient le mort d’eau bénite, avec de longs signes de croix malhabiles.

Tout à coup, des cris partirent de la cour et firent retourner les visiteuses. La veuve elle-même s’approcha de la croisée pour voir. C’étaient les croque-morts qui apportaient la bière. Devant eux, le père Rosier, le vieux concierge, écartait la marmaille en la menaçant de coups de fouet. Il avait levé le coude depuis le matin et sa manie de savetier habitué des réunions publiques, qui le poussait à prononcer des speechs tous les jours, se réveillait. Il faisait des phrases,