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CHARLOT S’AMUSE

pella les employés des pompes funèbres. Ça n’allait pas à son gré ; on aurait dû s’y prendre d’autre sorte. Et renforçant comme d’habitude son discours d’une mimique expressive, il voulut roidir encore la corde qu’il avait à la main pour montrer comment on aurait dû opérer. Sous sa traction, la bière vacilla et, dans un brusque sursaut, se renversant, plongea une minute la tête en bas.

Un « ha ! » d’indignation et de terreur courut dans la foule. Le père Rosier se méprit d’abord à ce cri, puis, s’apercevant du changement de position de la bière, il imputa sa propre maladresse aux croque-morts :

— Attention là-haut, vous autres ! Vous allez donner un coup de sang au camarade en le tenant les pieds en l’air !

Un nouveau murmure courut parmi les spectateurs, menaçant cette fois. Les plus gouailleurs d’entre les apprentis étaient le plus indignés, blessés dans ce respect inné et profond qu’à Paris le peuple professe pour ses morts. Charlot s’était avancé, pâle à faire peur, et comme grandi par la colère. Il saisit le portier par la manche et, bégayant, hors de lui, refoulant des larmes de rage :

— Vieille crapule !

Rosier n’osa pas répondre. Les paroles de