j’aurais atteint le non-penser, si le ciel et la mer avaient daigné sourire.
— Tout cela, répliqua le marin, est impression physique, donc dominable. Si vous étiez micrographe, vous vous apercevriez moins du temps !
Il riait. Marcel répliqua :
— Êtes-vous heureux de posséder des recettes !
— Pourquoi ce pluriel ? Je n’en ai qu’une : être content de soi pour être, suivant les cas, content des autres, ou pour pouvoir les mépriser. Ma recette : le travail. Je le trouve pareil à la foi, l’amour en vient avec la pratique. Le travail console, et l’absence…
De nouveau il s’arrêtait redevenu timide, et craignant d’être allé trop loin en obéissant à son impulsion sympathique.
— L’absence ?…
Le jeune homme n’avait dans le regard que de la mélancolie. Le capitaine, reprit plus bas :
— L’absence idéalise ce que l’on a fui : elle ne guérit rien…
Un silence encore tomba. Deschamps secouant la tète et chassant ses visions, le rompit :
— Pour travailler, il faut croire à quelque chose, ne fût-ce qu’en soi !
— Allons donc ! Excuse d’école, excuse de… paresseux ! Vous ne connaissez pas mon système d’éducation : prendre artificiellement l’habitude d’un travail qui, un jour, tôt ou tard, sera le refuge, le soutien, — la vengeance. La souffrance aigrit celui qui souffre, sans servir personne ; le travail sert tout le monde.
— Brrr ! Socialiste que vous êtes !… Mais que conseillez-vous à celui qui vous a connu trop tard, vous et votre panacée, à celui que l’absence d’horizon étreint et anémie ? Que conseillez-vous à celui qui se débat entre les débris des croyances dont s’aidaient nos