Page:Borel - Champavert, 1833.djvu/44

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Et, s’il faut tout dire, j’avouerai que j’éprouve une sensation presque aussi rêveuse, un plaisir aussi à l’aise, dans ces vastes logis du dix-septième et dix-huitième siècles que dans une salle capitulaire bizantine, ou dans un cloître roman. Tout ce qui fait ressouvenir de nos pères à nous, de nos aïeux trépassés sur notre France, jette dans le cœur une religieuse mélancolie. Honte à celui qui n’a pas tressailli, dont la poitrine n’a pas palpité en entrant dans une vieille habitation, dans un manoir délabré, dans une église veuve !

Autour de la table qui portait la bougie deux hommes étaient assis.

Le plus jeune tenait baissée une figure blême, sur laquelle pleuvaient des cheveux roux ; ses yeux étaient caverneux et faux, son nez long et en fer de lance ; vous dire que ses favoris étaient taillés carrément sur ses joues comme des sous-pieds, c’est vous dire que la scène se passait sous l’Empire, aux abords de 1810.


Le plus âgé, trapu, était le prototype des Francs-Comtois de la plaine ; sa chevelure, moisson épaisse, était suspendue, comme les