Page:Borel - Rapsodies, 1868.djvu/48

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Tant pour ma bouche elle est vase sacré,
Tant je révère une fleur languissante

Qui penche à son matin doré.


Jamais pistil n’eut plus belle corolle ! —
Livre ton âme a la sécurité ;
Pour le tombeau laisse ta piété ;
Console-toi, toi, dont l’aspect console,

Assez longue est l’éternité.


Reste avec nous ! que ton exil s’achève
Sombre, mais pur, ange au ciel attendu !
Va, dans la foule, un ami t’est rendu,
Il te comprend, raconte-lui ton rêve ;

Qu’il guide ton pas éperdu.


Plus avec toi de solitude fade,
Portrait divin ! car un portrait aimé,
C’est une amie au langage embaumé,
C’est pour mon cœur suave sérénade

Que berce un vent tout parfumé.


Qui t’a parfait ? bijou, bronze fragile,
Et ce bonheur, qui me l’a fait ?… — c’est Jehan !
Ce bon ami, dont l’ébauchoir agile
Sait éveiller Abélard de l’argile,
Hugo, Calvin, Esmeralda, Roland,

En dépit d’Homère et Virgile.