Page:Borel - Rapsodies, 1868.djvu/71

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Là, des casques mouvants, des forêts de mousquets,
La herse qui gémit, le bruit des huisseries :
On dirait le donjon semé de pierreries,
À ces feux plus nombreux qu’en de royaux banquets.

Tu vois, je t’obéis : de mon indifférence
Es-tu contente assez ? Pour moi, quelle souffrance !
Être seul avec toi sans t’accabler d’amours !
Non, non, ça ne se peut, tu m’apparais trop belle,
Adieu tous mes serments ; l’amitié fraternelle
N’est point faite pour nous : va, je brûle toujours !

Oh ! que tu es enfant ! Respecter des sottises
Et de fats préjugés ; te courber aux bêtises
D’un monde qui nous hait, et qui fait des vertus
Dont rougirait ton Dieu ! Crois-tu de la nature
La voix folle et trompeuse ? Oh ! cesse ma torture,
Si tu ne veux régner sur des murs abattus.

Or cet amour auquel tu te montres revêche,
En toi tout le décèle et tout en toi le prêche ;
Le galbe de ton sein, ton regard souriant,
Ton pas vite et léger, ou ta molle paresse,
Ton organe suave et ta main qui caresse…
Tout force à raffolir le plus insouciant.