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xv
introduction.

la superstition des chasses fantastiques, à laquelle nous avons consacré un des chapitres les plus étendus de cet ouvrage. C’est que le peuple, dont les facultés instinctives se développaient par le progrès naturel des siècles, aidé de l’influence civilisatrice du génie chrétien, était parvenu quelquefois à donner à ses inventions superstitieuses le double caractère d’une haute conception poétique : d’une part, comme nous l’avons dit, en revêtant les idées abstraites d’une image sensible qui les caractérisait ingénieusement, et les rendait plus frappantes et plus saisissables ; de l’autre, en découvrant, sous l’enveloppe des faits matériels, de délicates et mystérieuses analogies avec les mondes de la pensée et du sentiment.

Ce n’est donc pas, selon nous, par le prestige merveilleux qui s’y rattache, que les superstitions populaires sont vraiment dignes d’exciter l’attention et de provoquer l’intérêt, puisque ce prestige est d’autant plus près de se dissiper complètement, que l’on arrive à une connaissance plus exacte des véritables éléments dont se sont formées ces traditions miraculeuses ; mais, outre les curieuses recherches historiques auxquelles ces fables antiques doivent donner lieu, elles constituent aussi le thème le plus favorable qui puisse être soumis à l’observation, pour arriver à constater les tendances natives des facultés humaines. Comment, en effet, ces créations imaginaires que le peuple a sans cesse