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POSSESSIONS.

de ces femmes, le commerce du sabbat était un métier qui rapportait, à la fois, honneur et profit.

Pour démontrer la réalité de la possession, on alléguait aussi la preuve indispensable tirée des mouvements corporels, dépassant les forces de la nature.

Un journal, où l’on avait consigné tous les miracles de cette espèce, qui s’étaient produits pendant le cours de la maladie des prétendues possédées, avait été envoyé à la Faculté de médecine de Paris. Après avoir mûrement examiné les faits nombreux qui leur étaient soumis, les docteurs de la Faculté en distinguèrent seulement quatre que les causes naturelles ne pouvaient expliquer. C’était : 1o  Que les personnes mentionnées, en tombant subitement de leur hauteur sur le pavé, s’étaient donné plusieurs fois des coups à s’enfoncer le crâne, sans qu’il leur en fût jamais arrivé aucun accident. 2o  Que souvent elles pesaient, dans le temps de leurs syncopes, le double de leur poids naturel, au point que deux hommes avaient quelquefois bien de la peine à porter une enfant de dix ans. 3o  Qu’il y avait une de ces prétendues possédées qui savait échapper à tous les liens, quelque industrie qu’on mit à l’attacher sur son lit ou dans son fauteuil. Parfois elle échappait à des ligatures très serrées, sans même en défaire les nœuds, ou, d’autres fois, les nœuds se trouvaient coupés, bien qu’elle eût été attachée assez fortement pour ne pouvoir remuer ni les bras, ni aucune autre partie du corps. 4o  Qu’il y en avait une autre qui, voulant se jeter par la fenêtre du second étage, demeura long-temps suspendue en l’air, sans aucun appui sous les pieds ; qu’elle s’était assise sur le bord d’un puits, les pieds pendants à l’intérieur, le corps penché dans le vide, et, de plus, qu’elle était en syncope durant tout le temps qu’elle demeura dans cette posture.

Les antagonistes de la possession ne disputèrent point avec la Faculté sur la nature de ces faits ; il leur suffit de les écarter, comme étant mal établis, presque toujours présentés sous la garantie d’un seul témoin ; encore ce témoin n’était-il sou-