leux Richard Sans-Peur, fils du duc Aubert, et à son véridique homonyme Richard, fils de Guillaume Longue-Épée[1].
On prétendra peut-être que c’est faire remonter trop haut la rédaction primitive du roman de Richard Sans-Peur, que de la supposer antérieure au moins à la seconde moitié du douzième siècle. Cependant, cette opinion se justifie facilement, si l’on considère que, dès le commencement du treizième siècle, la légende de Richard Sans-Peur, enrichie de sa fausse chronologie, jouit déjà d’une assez grande popularité pour que les traditions étrangères se plaisent à s’y rallier et à se réclamer de sa parenté. Plusieurs romans du cycle Carlovingien : le Comte de Poitiers, les Quatre Fils Aymon, Garin-le-Loherain, citent Richard Sans-Peur comme un des douze pairs de France, et grand vassal tenant la Normandie au temps du roi Pepin[2].
Sans nous préoccuper davantage de ces recherches savantes et difficultueuses, pour ne rien négliger des particularités romanesques de la tradition, nous adopterons, dans l’analyse de la légende de Robert-le-Diable et de celle de Richard Sans-Peur, la chronologie fabuleuse que nous fournissent les chroniques normandes, dans toute la naïveté de leurs anachronismes.
- ↑ Les Cronicques de Normendie, imprimées à Rouen, en 1487, par Guillaume Le Talleur. Confronter le conte rapporté sous cette rubrique : Comme le duc Richard vainquit le Diable, avec le chapitre intitulé : Comme les moines de Fécamp furent sauvés par le duc Richard.
- ↑ Robert Wace publia le Roman de Rou en 1160. La Chronique de
Benoist de Sainte-More est postérieure à cette époque, de quelques
années. La rédaction du roman de Garin, par Jean de Flagy, semble
appartenir au commencement du xiiie siècle. N’est-il pas plausible que
ces écrivains, presque contemporains, ont puisé aux sources
leurs traditions fabuleuses sur Richard Sans-Peur ? D’ailleurs, si nous
accusons Robert Wace d’avoir emprunté aux trouvères, c’est d’après
sa propre autorité ; témoin ce vers du roman de Rou :
« A jugléors oï en m’effance chanter. »(Roman de Rou, p. 106, v. 2108.)