Page:Bosquet - La Normandie romanesque.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
10
CHAPITRE II.

récit historique, dans les premières pages des Chroniques de Normandie ; 2o comme poème, dans une composition intitulée : Li Romans de Robert-le-Diable, laquelle fut transformée, au xive siècle, en Dit ou Dité de Robert-le-Diable[1] ; 3o comme drame, dans une ancienne moralité mystique, qualifiée : Miracle de Nostre-Dame de Robert-le-Diable[2]. Ces trois compositions spéciales indiquent autant de versions différentes, nées de la fantaisie du poète, ou de la crédulité de l’historien. Notre récit

  1. La Bibliothèque du roi possède deux manuscrits du roman de Robert-le-Diable. La plus ancienne copie a été publiée en 1837, par G.-S. Trébutien, qui l’attribue à un auteur normand du xiiie siècle. La seconde copie est de la fin du xive siècle, ou des premières années du xve. Ces deux manuscrits n’offrent que bien rarement une conformité parfaite de leçons ; le second texte, tantôt développe, et tantôt abrège le premier. Pour de plus amples renseignements bibliographiques, voyez G.-S. Trébutien, préface du Roman de Robert-le-Diable.
  2. Les trois sources principales de la légende de Robert-le-Diable ont engendré un grand nombre d’imitations, dont l’énoncé se trouve dans la préface en tête du Roman, que l’on peut consulter à ce sujet. Le roman de Robert-le-Diable fut mis en prose vers la fin du xve siècle : La Vie du terrible Robert-le-Diable, lequel après fut nomme Lomme Dieu ; in-4o , gothique, P. Mareschal, Lyon, 1496. Défiguré et falsifié dans plusieurs éditions successives, il a pris place parmi les contes de la Bibliothèque bleue. Nous le retrouvons encore dans une publication de J. Castilhon, intitulée : Bibliothèque bleue, entièrement refondue et augmentée. Cet ouvrage est digne de tout l’intérêt que peuvent inspirer l’absurde et l’extravagant, débités avec ce ton d’importance qui en relève si ingénieusement le ridicule. L’histoire de Robert-le-Diable y est travestie à l’orientale d’une manière assez immodeste, avec quelques maladroites imitations des Mille et une Nuits. Les crimes et les malheurs de Robert-le-Diable sont représentés comme l’œuvre d’un génie malfaisant que la fée Minucieuse a attaché à la destinée de notre héros, même avant sa naissance. Chaque acte de réhabilitation de Robert converti marque une victoire remportée sur l’ascendant du fatal génie. N’oublions pas de mentionner, au nombre des épisodes les plus curieux de cette épopée grotesque, Robert, comédien par occasion, et chantant l’opéra à Turin. Assurément, l’auteur de la Bibliothèque bleue, refondue et augmentée, avait pressenti le chef-d’œuvre de Meyerbeer, le dernier et le plus brillant travestissement du héros de la romancerie normande. — Voyez Bibliothèque bleue, no II : Histoire de Robert-le-Diable, duc de Normandie. Paris, Costard, 1776, in-8o .