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LES DOCUMENTS.

Telles sont donc les grandes sources de cette histoire. Elles remontent aux jours mêmes du double procès fait au maréchal de Rais. Mais sont-elles aussi pures qu’authentiques ? Comme nous l’avons dit, trois greffiers furent spécialement attachés à la rédaction des procès-verbaux des séances : ce furent, pour les procédures ecclésiastiques, Jean Delaunay, Jean Petit et Guillaume Lesné ; un quatrième, Nicolas Géraud, leur fut plusieurs fois adjoint. Ensemble ils assistaient aux débats, prenant note des délibérations, des questions et des réponses ; ensemble aussi, le soir, et le plus souvent à la requête du promoteur, ils collationnaient leurs notes et donnaient au procès-verbal sa dernière forme, sous les yeux de l’évêque, de l’inquisiteur et surtout du promoteur, auquel

    Paris, directeur du Cabinet historique. Il est également conforme avec celui de la bibliothèque de Carpentras ; mais, preuve plus décisive encore de l’autorité irréfragable de ce document, il est aussi d’accord en tout point avec celui qui porte aujourd’hui le nom de Manuscrit de Thouars.

    Ce précieux manuscrit, longtemps ignoré, a son histoire. C’est un petit in-folio carré, en papier, nouvellement relié en parchemin. Il compte 420 feuillets anciens, en tête desquels M. Paul Marchegay en a ajouté un pour remplacer celui qui était perdu. Le procès latin va jusqu’au folio 303 ; les 108 dernières pages comprennent l’enquête et la procédure civiles, en français. Mais les folios 419 et 420 ne contiennent que les deux vers latins qui suivent :

            Egidi ! celebris nuper baro Radesiarum,
            Fine sub octobris luis, heu ! furcis et in igne !

    Est-ce quelque lecteur obscur qui a écrit ces vers ? Est-ce le copiste lui-même, qui, arrivé à la fin de son travail, a laissé échapper cette exclamation douloureuse ? ou quelque descendant de la famille de Rais, qui, après avoir lu les tristes pages d’une vie, qui aurait dû lui être chère, s’est laissé aller à ce mélancolique regret : « Ô Gilles, naguères célèbre baron de Rais, tu expias tes forfaits au bout d’une potence et sur un bûcher ! »

    Cette copie importante remonte à l’année 1530. Elle fut faite le 18, le 19 et les jours suivants du mois de juillet, à la requête de Gilles de Laval et de son épouse, Françoise de Maillé, dame de Loué et de Maillé, par Yvon Le Bœuf, leur fondé de pouvoirs, et tiré du trésor des Chartes du château de Nantes, sous les yeux de Gilles Le Rouge, chevalier et conseiller ordinaire du roi de France ; de Pierre Laurens, seigneur de la Noue, trésorier et conservateur des chartres du château de Nantes ; du procureur général du duché de Bretagne, et enfin de Jacques Meauce, fondé de pouvoirs des sires de la Trémoille. Cette copie contenait « les procès, les enquêtes et les informations », dont la reproduction occupe les 411 feuillets que nous possédons. Munie du seing de Gilles Le Rouge et de Christophe Pèlerin, secrétaire du roi au pays de Bretagne, elle fut reproduite sous les yeux des mêmes témoins et avec les