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XV


APRÈS LA MORT. — GILLES DE RAIS, BARBE-BLEUE.

Il y a, dans la tragédie ce que M. Saint-Marc Girardin appelle la stabilité des caractères, l’un des charmes de la littérature dramatique. Les héros du théâtre antique et moderne, Hector, Andromaque, Achille, Médée, sont des types invariables que les poètes reproduisent fidèlement : c’est tout au plus s’ils font ressortir un trait particulier de ces figures traditionnelles plutôt qu’un autre. Il en est de même dans les fables de La Fontaine, où les hommes divers, comiquement affublés de la peau et des mœurs des animaux, conservent toujours leur caractère propre. Seulement le fabuliste leur donne, suivant les circonstances, une expression et une contenance particulières qui en font toute la variété. L’unité sert de fond à la diversité : ainsi, tel sujet, par l’idée toujours identique à lui-même, comme la maternité divine, a pris sur la tapisserie ou sur la toile, au gré de l’imagination des artistes, les formes et les dessins les plus variés.

Cette stabilité et ce charme des caractères se retrouvent également dans le conte et la légende : la légende et le conte ne sont-ils pas la tragédie des enfants, pour ne pas dire aussi des hommes, lorsque, fatigués d’être hommes, ce qui n’est pas rare, ils éprouvent le besoin et se font un délicieux bonheur de se sentir encore enfants ? Croquemitaine, Cendrillon, le Petit Poucet, Barbe-Bleue, sont des types tellement