Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/490

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Ce que fit la philosophie pour conserver l’estat de la Grece, n’est pas croyable. Plus ces peuples estoient libres, plus il estoit necessaire d’y établir par de bonnes raisons les regles des moeurs, et celles de la société. Pythagore, Thales, Anaxagore, Socrate, Archytas, Platon, Xenophon, Aristote, et une infinité d’autres remplirent la Grece de ces beaux préceptes. Il y eût des extravagans, qui prirent le nom de philosophes : mais ceux qui estoient suivis, estoient ceux qui enseignoient à sacrifier l’interest particulier et mesme la vie à l’interest général et au salut de l’estat ; et c’estoit la maxime la plus commune des philosophes, qu’il falloit ou se retirer des affaires publiques, ou n’y regarder que le bien public.

Pourquoy parler des philosophes ? Les poëtes mesme qui estoient dans les mains de tout le peuple, les instruisoient plus encore qu’ils ne les divertissoient. Le plus renommé des conquerans regardoit Homere comme un maistre qui luy apprenoit à bien regner. Ce grand poëte n’apprenoit pas moins à bien obéïr, et à estre bon citoyen. Luy et tant d’autres poëtes, dont les ouvrages ne sont pas moins graves qu’ils sont agréables, ne célebrent que les arts utiles à la vie humaine, ne respirent que le bien public, la patrie, la societé, et cette admirable civilité que nous avons expliquée.

Quand la Grece ainsi élevée regardoit les