Page:Bossuet - Discours sur l’Histoire universelle, 1681.djvu/562

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fin, et c’est faute d’entendre le tout que nous trouvons du hazard, ou de l’irrégularité dans les rencontres particulieres. Par là se verifie ce que dit l’apostre, que Dieu est heureux, et le seul puissant roy des rois, et seigneur des seigneurs . Heureux, dont le repos est inalterable, qui voit tout changer sans changer luy-mesme, et qui fait tous les changemens par un conseil immuable ; qui donne, et qui oste la puissance ; qui la transporte d’un homme à un autre, d’une maison à une autre, d’un peuple à un autre, pour montrer qu’ils ne l’ont tous que par emprunt, et qu’il est le seul en qui elle réside naturellement.

C’est pourquoy tous ceux qui gouvernent se sentent assujetis à une force majeure. Ils font plus ou moins qu’ils ne pensent, et leurs conseils n’ont jamais manqué d’avoir des effets impréveûs. Ni ils ne sont maistres des dispositions que les siecles passez ont mises dans les affaires, ni ils ne peuvent prévoir le cours que prendra l’avenir, loin qu’ils le puissent forcer. Celuy-la seul tient tout en sa main, qui sçait le nom de ce qui est et de ce qui n’est pas encore, qui préside à tous les temps, et prévient tous les conseils.

Alexandre ne croyoit pas travailler pour ses capitaines, ni ruiner sa maison par ses conquestes. Quand Brutus inspiroit au peuple romain un amour immense de la liberté, il ne songeoit