Page:Botrel - Contes du lit-clos, 1912.djvu/79

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C’est moi, l’Ankou ! … L’Ankou qui brise
Un os de mort dont il aiguise
Sa vieille faulx sur son genou…
Moi ! qui puis te faire, à ma guise,
Le sang plus froid que le caillou !

Lorsque à le frapper je m’apprête
L’homme riche s’écrie : « Arrête !
Laisse-moi vivre un jour encor
Et je remplirai ta charrette
De mes grands coffres tout pleins d’or !… »

Un jour !!! pas même une seconde !
Car si j’acceptais, à la ronde,
Ne fût-ce qu’un demi-denier,
Nul ne serait riche en ce monde :
J’aurais tout l’Or du monde entier !

Qu’à sa tête on allume un cierge,
Qu’avec l’eau bénite on l’asperge
Et que l’on jette un drap dessus :
Je n’ai pas fait grâce à la Vierge,
Je n’ai pas fait grâce à Jésus !

Au temps du Déluge et de l’Arche,
On a vu plus d’un Patriarche
Vivre huit et neuf fois cent ans…
Pourtant à chacun j’ai dit : Marche !
Tous m’ont suivi… depuis longtemps !