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I

Les Parnassiens proscrivent toute innovation. Ils insistent sur l’inanité, je ne dirai pas des réformes, mais des fléchissements, des adoucissements aux préceptes de la rime. Certes, je comprends très bien qu’on n’aime pas les vers libres ; moi-même, tout en m’y intéressant fort, je me sens incapable d’en user. Question de nature peut-être, et, à coup sûr, de métier aussi… Mais qu’on n’admette pas certains tempéraments à l’inflexibilité de ces règles ; qu’on n’accorde pas, à des questions de césure ou d’hiatus, certaines licences que, d’ailleurs, les Grands de la Pléiade, Ronsard, du Bellay, Baïf, Jodelle, Ponthus de Thyard et d’autres, moins illustres, mais honorablement connus pourtant, avaient érigées pour ainsi dire en règle, voilà ce qui me passe. Le παντα ρει universel englobe la poésie comme la vie elle-même. Il faut adapter une règle aux circonstances et au moment. Sous peine de répétitions et de redites perpétuelles on doit continuer la marche en avant. Toute stagnation est synonyme de mort. Pourquoi l’évolution du vers ne serait-elle pas indéfinie comme le progrès lui-même ? Rien jamais, ici-bas, ne touche à son terme.