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Page:Boucher de Perthes - De la misère.djvu/46

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le riche échappe à une foule d’impôts, ou s’il les paie il n’en fait que l’avance. Je ne prétends pas que telle a été l’intention du législateur et que tel est le but de la loi ; mais tel est le résultat final et infaillible de son application. Ajoutez que l’esprit de fiscalité s’exerce plus facilement et par suite plus activement, à mesure que l’individu est plus faible ou la matière plus taillable.

Revoyez donc votre législation sur ce point ; encouragez les détaillans, les petits marchands les fournisseurs du pauvre ; ne les écrasez pas d’entraves et de droits, puisque ces entraves, ces droits tombent tous sur le malheureux.

Jusqu’à ce que ces heureuses réformes aient eu lieu, le pauvre pour échapper à tant de plaies, aux prix de détail, à l’intérêt usuraire du crédit et aussi a l’inconséquence de la loi, peut encore employer le raisonnement et la prévoyance, remède universel, et égaliser ainsi jusqu’à un certain point les charges et les chances de bien-être. Or, puisqu’un ménage, quelque nombreux qu’il soit, est, avec une aisance modérée, plus riche que dix ménages séparés qui ensemble présenteraient le double de revenu, pourquoi ces dix ménages n’en feraient-ils pas un seul ? Pourquoi ne se réuniraient-ils pas pour leurs acquisitions de comestibles ? N’est-il aucune fourniture, aucun approvisionnement qui puisse se faire collectivement ? Est-il donc si difficile de s’entendre pour économiser, quand on est si vite et si souvent d’accord pour dépenser ? Ah ! c’est que dans l’économie, il n’est question que de l’existence ; dans la dépense il s’agit, du plaisir, et partout le plaisir passe avant la vie. Quel parti cependant, ne pourrait-on pas tirer de ces associations de ménages, non-seulement pour l’épargne mais pour l’harmonie, l’instruction et la paix !

Qu’est-ce, chez nous, qui s’oppose à cette confraternité d’intérêts ? Un amour-propre mal entendu, la défiance, l’envie, l’ignorance, l’absence de réflexion : on n’y a jamais songé cela ne s’est pas fait jusqu’à présent, donc cela ne