Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/228

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comme d’ailleurs tous les montagnards, se sont toujours fait remarquer par l’amour qu’ils portent à leur pays.

L’heure du départ arrivée, nous nous empressons de rentrer à bord. Du lac, nous admirons des maisons bâties sur la colline et séparées par des jardins en terrasse, formant ainsi trois étages que couronne une montagne verdoyante. Malheureusement la brume revient encore : ce lac y paraît terriblement enclin. Cependant, comme elle ne s’élève qu’à une certaine hauteur, nous n’en voyons pas moins de très-beaux sites de montagnes dont les cimes paraissent ainsi séparées de la terre. Bientôt elle entoure notre bâtiment de façon à inquiéter le capitaine qui craint de rencontrer quelqu’autre vapeur ou d’aller se briser contre la rive ; bref, nous jouons là à un assez triste Colin-Maillard. Aucune précaution n’est négligée : un homme est placé à l’avant, essayant de percer l’obscurité toujours croissante ; un autre sonde ; enfin un fanal est allumé, et l’on donne de temps en temps un coup de cloche. Je n’ai jamais vu, même à Londres, un brouillard si épais.

Les animaux partagent l’angoisse générale : deux chiens, qui jouaient sur le pont, sont devenus soucieux et restent immobiles, la queue entre les jambes. La pluie vaudrait dix fois mieux, fût-elle une pluie d’orage avec accompagnement de tonnerre.

Nous devons être à la hauteur d’une station, mais on ne voit pas la rive : aborder n’est pas facile. La cloche sonne à toute volée pour annoncer que nous sommes là. Si nous avions eu de l’artillerie, nous aurions tiré le canon d’alarme.