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UNE DE PERDUE

passagers. Le capitaine se moucha, Sir Gosford toussa, Clarisse avala une énorme gorgée de thé au risque de se brûler, et Sara sourit tristement. Cependant à mesure qu’il parlait, l’idée de la scène du comte sortant de la farine, vint peu à peu prendre la place des idées plus sombres, que la vue du spectacle sur le pont avait réveillées dans leur esprit.

Déjà le déjeuner avait duré quelque temps, quand un coup de canon se fit entendre. Tous se levèrent à la fois. Le capitaine s’élança sur le pont.


CHAPITRE VII.

l’abordage.


Le reste des passagers se hâta de suivre le capitaine. Celui-ci vit que dans deux heures, tout au plus, la corvette les aurait rejoints, et qu’il était inutile à lui de songer à réparer les avaries qu’avaient éprouvées les mâtures et les cordages de son navire. Sa figure, de gaie et souriante qu’elle était au déjeuner, était devenue sérieuse et sombre. C’était une bien critique situation que celle dans laquelle il se trouvait. Sa vie qu’il allait risquer, il n’y songea pas un seul instant ; ce n’était pas ce qui l’occupait ; il pensait au sort bien plus effrayant que la mort qui attendait ses deux jeunes passagères, dont l’une était si aimable dans sa gaieté et l’autre si intéressante dans sa timide mélancolie, si les pirates parvenaient à s’emparer de son navire. Cet homme si fort eut un instant un indicible sentiment de crainte ; mais il