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ROBERT LOZÉ

la ligne inachevée du Northern Pacific qui se terminait dans la prairie. Il s’était formé, autour de ce terminus temporaire, l’ébauche d’une ville. Une population féroce se massait là, sous des abris de toile ou de planches, quelquefois à la belle étoile. C’était l’écume du continent, grossie encore d’un grand nombre de métis et d’autres hybrides vivant de rapine et, à l’occasion, de meurtre. Au dehors campaient les Sioux, plus sanguinaires encore, mais moins dangereux, étant plus connus et mieux surveillés. Toute cette population était tenue en respect par un détachement de soldats dont l’autorité ne s’étendait pas plus loin que la portée de leurs fusils. Les officiers nous offrirent l’hospitalité.

Nous avions à compléter nos approvisionnements, à acheter des chevaux et à choisir des guides. Et c’était là le plus important, car de ce choix devait dépendre le succès de notre expédition. Les officiers du poste nous conseillaient d’attendre, car ils ne connaissaient personne qu’ils pussent nous recommander. J’étais de leur avis, comprenant toute l’imprudence qu’il y aurait de confier nos biens et notre vie à des inconnus sortis d’un pareil milieu. Mais mes compagnons, impatients et ne se rendant pas compte du danger, s’abouchèrent avec deux métis mexicains qui leur promettaient des merveilles. Ils étaient d’ailleurs séduits par la justesse extraordinaire de leur tir avec la carabine et le revolver. Au galop de leurs montures, ces hommes pouvaient atteindre d’une balle une pièce de monnaie lancée dans l’air.

— Surveillez-les bien. Telle fut la dernière recommandation que nous fit le commandant du poste.

Nous voilà donc partis, cinq cavaliers avec vingt chevaux de somme et dix de relais. Nos armes étaient excellentes ; nous portions des approvisionnements pour un mois.

Les premiers jours de notre voyage se passèrent sans incident notable ; nous ne trouvâmes pas de bisons. Chaque