— Dites plutôt que possesseurs de grandes richesses, nous n’avons pas encore appris à nous en servir. Le monde entier, l’Europe surtout, est là avec des capitaux disponibles qui attendent des placements. Notre gouvernement tient des richesses nationales inépuisables qui lui permettraient d’emprunter presque à l’infini. Dès lors, il serait facile de mettre ces capitaux entre les mains des Canadiens qui offriraient les garanties d’instruction, d’habileté et de conduite nécessaires. Qu’a fait l’Angleterre lorsqu’elle a fondé sa banque nationale ? Qu’a fait Napoléon en fondant la banque de France ? Qu’ont fait tous les pays industriels du monde, sans en excepter les États-Unis ? Partout les pouvoirs publics sont venus en aide aux citoyens, lorsque l’opinion et la nécessité les poussaient vers les carrières productives de la richesse matérielle. Des moyens adoptés ont pu varier quelque peu, mais au fond, c’est le même principe qui a partout prévalu. Et dans chaque cas, la richesse publique en a été centuplée, la population et la puissance de l’État augmentant dans les mêmes proportions.
La province de Québec peut faire de même. Elle a tout ce qu’il faut pour devenir un des grands peuples industriels du monde, puisqu’elle a pratiquement le monopole des bois d’industrie. Elle a un gouvernement autonome qui peut mettre en valeur ce domaine ou aider aux particuliers à le faire. Un tel mouvement serait favorablement accueilli par la métropole. Si les Canadiens-français libres ne savent pas exploiter les richesses de leur province, s’ils se laissent supplanter par d’autres, ils auront mérité le sort qui les attend.
— Quant à moi, dit Robert, j’ai la confiance que, en cela comme en tout le reste, nos compatriotes se montreront dignes de leur passé. Elle n’est pas morte cette pensée profonde qui leur a permis de s’affranchir de tant de jougs qui semblaient devoir les écraser. Les jours les plus sombres sont maintenant passés, les luttes de l’avenir seront moins