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Page:Bouchette - Robert Lozé, 1903.djvu/87

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ROBERT LOZÉ

comprit qu’on avait atteint la base du terrassement. Alors il lâcha prise et regarda autour de lui.

Le char, solidement construit, était tombé sur le côté sans se rompre. La jeune femme s’était dressée, droite. Ses yeux exprimaient une indicible terreur, mais elle ne paraissait pas blessée. Il n’en était pas ainsi de son mari. Ce dernier gisait immobile et baignant dans son sang. Il s’était plus occupé probablement de sa femme que de lui-même et il avait donné de la tête contre un des lampions du plafond. Le pauvre domestique nègre était devenu la victime de sa vanité. Sa tête disparaissait dans l’espace vide derrière une glace brisée. Dans cette position, il paraissait décapité et son corps s’agitant convulsivement ajoutait à l’illusion. Mais aux cris désespérés qu’il poussait, on pouvait croire que sa gorge était intacte. On entendait au dehors les sifflements saccadés de la locomotive qui était restée sur la voie et qui appelait au secours, et entre chaque sifflement, les cris des blessés et la rumeur grandissante de la foule qui se pressait déjà autour des ruines, car l’accident avait eu lieu dans la ville de Lévis même.

Personne n’avait encore pénétré dans le wagon.

Robert, revenu du premier étourdissement de sa chute, dégagea d’abord le malheureux nègre de l’espèce de trappe où il se trouvait pris, et constatant qu’il n’avait que des égratignures, il lui commanda de lui aider à relever le pauvre jeune homme évanoui, peut-être mortellement blessé. Sa femme était maintenant à genoux près de lui, s’efforçant machinalement d’étancher le sang qui coulait abondamment de sa blessure. Elle était évidemment dans une demi-stupeur.

Le plus difficile était de communiquer avec le dehors. Dans la position où était tombé le char, une rangée de fenêtres reposait sur le sol, tandis que l’autre se trouvait au-dessus de la tête des victimes. Les deux portes aux ex-