Page:Bouchor - Israël en Égypte, 1888.djvu/29

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puissante émotion lorsque s’élève du fond de l’âme le chant qui accompagne ces paroles : « Dans le sanctuaire, Seigneur, que tes mains ont fondé ! » Il y a là une courte phrase que je retrouverais sans peine, avec de légers changements, dans les magnifiques adieux de Brünhilde à Siegfried : elle est d’un élan sublime. Il serait puéril d’insister sur ce rapprochement. Le génie est toujours le génie, qu’il se nomme Hændel ou Wagner ; et il y a des moments où sur les âmes les plus dissemblables passe un même souffle d’irrésistible inspiration.

Je ne détaillerai pas les mérites de mademoiselle Spies. Je ne pensai, en l’écoutant, qu’à la beauté de ce qu’elle chantait ; l’identité me parut absolue entre la pensée du maître et l’interprétation de l’artiste. Le soir de l’exécution solennelle, les ténors qui devaient entonner le chœur final, aussitôt après l’air dont je viens de parler, manquèrent leur attaque : ils avaient trop bien écouté, et ils étaient ravis d’admiration. Pour qui a une seule fois entendu le chœur du Gesangverein, si puissamment dirigé par M. Volkland, rien autre ne saurait rendre compte de cette unique défaillance, qui fut aussitôt réparée. Étant