Page:Bouchor - Les Symboles, première série.djvu/31

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repos de l’âme au sein de Dieu et le rêve d’une immortalité active, consacrée au triomphe de la justice. J’admirais la puissance des religions parce qu’elles donnent une certitude inébranlable : aussi je m’efforçai de trouver en quelques-unes un sens profond qui ne s’éloignât pas trop de mon indécise métaphysique. J’adoptai quelque chose des idées chrétiennes. Je crus à une Trinité, à un Fils de Dieu dont Jésus n’était que la figure : ce Christ, à jamais incarné dans le monde, le rachetait de l’éternel péché par un sacrifice éternel. Je n’aurais pas toujours su dire ce qu’il y avait de symbolique ou de littéral dans ma doctrine. J’y mêlais encore les inventions de la Kabbale, dont la métaphysique, exprimée en bizarres images, s’accordait assez bien avec mes propres rêveries. Cependant ma raison protestait contre certaines absurdités du système ; et j’avais en horreur un ésotérisme par lequel les adeptes dissimulent la pauvreté de leur science mystérieuse.

La manière dont je traduisis mes idées les rendit encore plus confuses. Je le fis dans un livre, L’Aurore, inspiré surtout par la passion ; au conflit des idées s’ajouta le tumulte des sentiments. « Trouble et brumeuse aurore, me disais-je, qui sera suivie par la lumière d’une foi éclatante. » Il n’en fut rien ; et pourtant la paix du cœur et de l’esprit, même désa-