Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/234

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Que produit une spécialisation professionnelle ainsi doublée de différenciation sociale ?

Historiens et théoriciens de l'économie politique en tombent aujourd'hui d'accord ; il importe avant tout de distinguer soigneusement entre les diverses formes de la division du travail que l'analyse d'Adam Smith confondait encore lorsqu'elle alléguait pêle-mêle l'épingle de la manufacture, le clou du forgeron, l'habillement du journalier 442. À côté du phénomène de la distinction des pro­fessions ou spécialisation proprement dite – dont l'homme qui se fait un métier de la confection d'une seule catégorie d'objets donne un exemple – il faut classer à part la décomposition des opérations – le produit passant de main en main, pour revêtir des formes différentes à l'intérieur d'une même entreprise – et le sectionnement de la production – diverses entreprises concourant non seulement pour la fabrication, mais pour le transport et le débit des objets.

On devine aisément, par ces définitions mêmes, quelle est la forme de division du travail qui devra dominer en Inde. Ce n'est pas le sectionnement de la production, qui suppose une organisation industrielle et commerciale très compliquée. Ce n'est pas non plus la décomposition des opérations, qui de­mande la concentration d'un grand nombre d'ouvriers dans un même établis­sement. C'est surtout la distinction des professions, la spécialisation propre­ment dite. Sur ce terrain, les Hindous semblent en effet avoir poussé les divisions et subdivisions aussi loin qu'il est possible. Ce n'est pas seulement à raison des objets produits, c'est à raison des instruments employés pour les produire que les métiers se différencient : le moindre prétexte à monopole est pieusement utilisé. Déjà dans l'ordre des occupations les plus primitives, les distinctions