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Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/242

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des diverses castes, il faut faire entrer en ligne de compte bien des raisons qui se laissent malaisément rattacher à « l'histoire naturelle des progrès de l'industrie ».

Au surplus, quand bien même le souvenir de ces progrès rendrait compte en effet de la supériorité des métiers d'artisans, utilisant plus ou moins la métallurgie, sur les métiers accessibles aux races les plus barbares, il reste que dans la civilisation hindoue, obsédée qu'elle est par d'autres prestiges, le rang assigné aux activités du type industriel reste toujours très bas placé. M. Dutt a relevé, dans différents codes hindous, les traces du mépris où elle est tenue 456. C'est au milieu des castes impures et qui polluent les aliments qu'elles touchent, c'est entre les prostituées et les eunuques, les acteurs et les ivrognes que Yajnavalkya, par exemple, classe non pas seulement les corroyeurs ou les blanchisseurs, mais les tisserands, les teinturiers, les presseurs d'huile, les forgerons et les orfèvres. Ailleurs, dans le code de Manou, est rangé parmi les péchés (upapâtakas) – entre l'impiété de celui qui n'entretient pas le feu domestique et la malhonnêteté de celui qui ne paie pas ses dettes – l'acte de surveiller une manufacture et d'exécuter de grands travaux mécaniques. Sous le poids de pareilles dépréciations, comment, demande M. Dutt, les arts indus­triels pouvaient-ils s'épanouir en Inde 457 ? On a parfois rappelé à ce propos la répugnance générale des Aryens pour les travaux manuels. Cette répugnance est loin de présenter la même intensité et surtout de garder une durée égale dans toutes les branches de la race aryenne. Chez les Grecs, en particulier, il semble que le travail n'ait pas été aussi universellement mésestimé qu'on l'a cru longtemps, sur la foi de quelques philosophes 458. Ce qui est vrai c'est que, partout où