Page:Bouglé - Essais sur le régime des castes.djvu/276

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les Brâhmanas préciseront sont esquissées déjà 516. Le sacrifice n'est pas seulement une imitation des phéno­mènes naturels, il les produit. Et, sans doute, à la différence de l'opération proprement magique, il n'agit que par l'intermédiaire des dieux. Mais entre les hommes et les dieux, le sacrifice crée comme un contrat, et qui assure à l'orant une sorte de pouvoir de contrainte. En ce sens, qui sert les dieux leur commande. L'idée de la toute-puissance du prêtre apparaît ainsi dès les Védas, avec celle du grand danger que courraient les hommes à vouloir se passer de ses services, et à ne pas le rétribuer convenablement 517. Bergaigne n'a-t-il pas montré que ce char radieux qui commence si poétiquement l'hymne à l'aurore signifie en réalité le salaire ? C'est à lui que les prêtres attribuent tous les effets du sacrifice ; il en constitue à leurs yeux l'élément essentiel 518. C'est pourquoi M. Oldenberg pouvait parler du caractère intéressé de la poésie védique. Elle est traversée d'un double souci : attirer sur les hommes les bienfaits des dieux, et sur les prêtres les salaires des hommes.

Une poésie qui répond à de pareilles demandes doit naturellement com­porter plus d'artifice que de laisser-aller. Les hymnes sentiront donc le métier. Les auteurs se vanteront de fabriquer un bel éloge « comme un habile charron fabrique un char ». Leur souci dominant est moins d'exprimer une émotion personnelle que de capter les dieux dans un filet bien tressé. La préoccupation technique l'emporte ici sur l'inspiration poétique. Et plus qu'à rendre des sentiments humains, en un langage accessible à