pération des antagonismes de classes que la théorie paraît supposer ? En fait, entre le groupe des capitalistes et le groupe des prolétaires, les intermédiaires se multiplient. Petits possédants ou grands salariés, le nombre s’accroît de ceux qu’on ne sait où classer au juste. À l’intérieur de chacun des deux groupes opposés, comme entre l’un et l’autre, se révèle une foule de degrés et de nuances. — La théorie socialiste serait donc une simplification violente de la réalité ?
Et nul doute que sur tous ces points les socialistes n’aient quelque chose à répondre. Ils se feraient fort de réparer toutes les brèches et d’opposer arguments à arguments. — Ils montreraient par exemple que dans nombre de cas, la dissémination des exploitations ne contrarie la concentration capitaliste qu’en apparence. Beaucoup de petits établissements ne sont que des succursales. La majorité tombe dans une dépendance de plus en plus étroite. Dans les branches dominatrices de la production, c’est indubitablement la grande industrie qui fait la loi. — Dans ces conditions il ne faut pas que la survivance des formes antérieures du travail nous fasse illusion. Le travail à domicile, distribué par la grande entreprise, n’est pas plus libre ni moins déprimant, au contraire, que le travail à l’usine. Le cumul des travaux dans les ménages n’est destiné le plus souvent qu’à fournir un salaire d’appoint rendu indispensable par l’insuffisance du salaire principal. En fait, tandis que le nombre des producteurs indépendants baisse relativement, le nombre des salariés continue de monter. — La tendance est donc indéniable. En dépit de tous les crans d’arrêts intermédiaires, les hommes sont entraînés vers l’un ou l’autre des pôles extrêmes. Les améliorations partielles que la classe ouvrière a pu conquérir ne changent rien à sa situation essentiellement précaire. Tant qu’une partie de la population aura son axe dans la propriété, et l’autre dans l’absence de propriété, la différen-