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LA SOCIOLOGIE POPULAIRE ET L’HISTOIRE

individuelle de nos soldats. C’est ainsi que M. Langlois parlant de l’Université bolonaise, au Moyen Âge, remarquera qu’une aristocratie de docteurs, recrutée par coopération, tend à la routine, et il ne pourra retenir cet aphorisme : « C’est l’instinct naturel des corps, comme des individus qui ne se renouvellent plus, de se replier sur eux-mêmes et de défendre leur repos. »

Nous retrouverions des généralisations analogues sous la plume des historiens contemporains les plus divers. Feuilletons seulement l’Histoire de France publiée, sous la direction de M. Lavisse, par un certain nombre de professeurs de facultés. Aucun n’échappe à la règle. C’est M. Bloch, par exemple, qui à propos des traces de clientèle qu’il relève en Gaule nous fait remarquer que le régime de la protection « s’impose et domine toutes les fois que l’État se montre inférieur à sa tâche, c’est-à-dire incapable d’assurer la sécurité des individus, soit qu’il n’ait pas encore achevé de se constituer, soit qu’il ait commencé déjà à se dissoudre. » Il montre que la révolution contre la monarchie a été « en Gaule comme ailleurs » l’œuvre de l’aristocratie. En expliquant la situation exceptionnelle de Marseille, il rappelle que la tyrannie et la démocratie sont choses normales dans les villes de commerce et de marine. — De même, M. Luchaire expliquera la décadence de l’épiscopat non par le tempérament de tels ou tels évêques — mais par la situation que leur fait le système féodal lui-même. Propriétaires et grands seigneurs, leurs domaines peuvent être achetés ou hérités : l’épiscopat devient une caste et prend toutes les maladies des castes. N’est-ce pas ce même système féodal, lançant à la conquête de terres nouvelles les fils nombreux de