Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/235

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s’approche, m’embrasse. Pareilles aux pommes vivesdes jardins, les joues de Clarisse brillent dans leur fraîcheur. Je la saisis avec passion, je baigne son visage de baisers.

Méditons, rêveusement un peu, dans le demi-jour de la lampe remueuse. Ecarlate, la fleur luit et brille. Un pâle mur de stuc accueille le feu rose. Une douceur somnole, oscille, s’assoupit.

O mon amie, rappelez-vous combien de languissantes et monotones journées nous passâmes mélancoliquement dans l’infini de nos tendresses. A voir vaciller les grandes pluies sonores, quelles félicités ne goûtionsnous point, quand cette puissante retraite nous abritait. Leur chute d’eau était régulière et leur fuite liquide brillait sur les toits. Les vents transportaient dejeunes flux humides. Cette fraîcheur purifiait l’azur et la scintillation des feuilles s’augmenta d’un lucide éclat. Tout au loin les troupeaux paissaient. De chaudes vapeurs d’or sortaient des flancs bruns. Les prairies s’enflaient comme un marécage, des herbes vaporeuses devinrent frémissantes.

« Dans ces périodes de froid, d’émoi et de silence, comme tout revêtait une beauté plus pure ! Nous éprouvions, au paroxisme, la mélancolie et la mort. La bonté des murs nous rassérénait. Nous nous sentions à l’abri. Bien que ces beaux lieux nous parussent confus, nous gardions pour nous-mêmes, un très noble équilibre. Oa va et on vient dans la chambre, au moment que s’ébroue et souffle un ouragan. On rit et on s’occupe de rustiques minuties. Les grosses pommes luisantes cuisent dans d’ardentes cendres. Les oiseaux gémissent, pris aux