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Page:Bouhélier - L’Hiver en méditation, 1896.djvu/240

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joie. J’ai transfiguré de bas sentiments en les décorant de candeur. Un son de foudre augmente mon souffle et le plan de vie que je me propose perpétue l’entreprise des dieux

— Précisément le ciel nocturne luisait. A travers la fenêtre ouverte, nous aperçûmes, sur la grande route le poudreux frémissement des pesantes flammes vertes que répandent les lanternes champêtres. Des lueurs polissaient l’éclat du hameau. Ma poitrine s’enfla comme l’orageuse mer. Je voulus de notoires luxures. La volupté du monde me tourmenta. — « O Clarisse, Clarisse, communions enfin ! Tout demeure vide et vain, sinon l’amour. Il faut vivre à cause des béatitudes que celui-ci nous inspirera et pour l’heureuse victoire du pain et des travaux. Il ne s’agit plus de se recueillir, mais allons vers les grandes prairies dont l’herbage blanchit sous un flux de lune. L’azur qui se gèle au marais du ciel, dès l’aurore prochaine, ne reluira plus. Délaissons les jeux intérieurs et ne restons plus si pensifs. Occupons-nous des pommes, des roses, des glorieuses fêtes de la nature. Entends braire l’âne parmi l’étable, écoute le chant des rossignols quand le vent balance les jeunes nids de paille. »

Puis notre entretien dévia. Mon amie ne m’entendait plus. Je distinguai une fois encore combien peu l’intéressent mes confidences. Pour elle, d’ailleurs, elle me fit part de ses soucis : l’air froid allait brûler les fruits resplendissants desquels la grosse flamme tournoie aux branches lourdes. Elle est très inquiète à cause des gelées, des grandes grêles probables pour la nuit. Et puis, demain matin, elle va laver des linges, il convient