Page:Bouilhet - Œuvres, 1880.djvu/43

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Et versant à l’entour, les parfums de la nue,
La nuit, la nuit a vu, de ses prunelles d’or,
Ce qu’il faut de baisers et d’ardeur inconnue
Pour rallumer une âme et réchauffer un mort.

Vierge, je ne suis pas le vieux roi centenaire !
Le temps n’a point encor fait blanchir mes cheveux,
À peine quelques jours, j’ai paru sur la terre,
Et je vois mon berceau, quand je tourne les yeux.

Pourtant, comme un vieillard, j’ai l’âme froide et nue,
Voilà que tout mon cœur est éteint maintenant,
Et je m’en vais mourir, car tu n’es pas venue,
Ô brune Abizaïg, ô vierge de Sunam !


1848.




Quand vous m’avez quitté, boudeuse et mutinée
Secouant mes baisers, comme un arbre ses fleurs,
Je restai seul, debout, près de la cheminée,
Me forçant au sourire, et me sentant des pleurs.

C’était le premier doute et le premier nuage
Dans ce beau ciel d’amour qu’un souffle peut ternir,
Et me croyant bien fort, et me posant en sage,
J’avais raillé vos saints que j’aurais dû bénir ;