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FESTONS ET ASTRAGALES.


Et maintenant, adieu ! suis ton chemin, je passe !
Poudre d’un blanc discret les rougeurs de ton front ;
Le banquet est fini, quand j’ai vidé ma tasse,
S’il reste encor du vin, les laquais le boiront !




J’aimai. Qui n’aima pas ? La vie est un voyage,
J’eus vingt ans comme un autre, et j’ai passé par là.
Fut-elle blonde ou brune, insouciante ou sage ?
Que vous fait le trépied, si mon âme y brûla ?

Puis j’appris qu’à tromper les femmes sont habiles,
J’ai bu ta lie amère, ô vin des passions !
Je pouvais, à mon tour, m’en aller par les villes,
Criant ma foi perdue et mes illusions.

Oui, j’ai su votre mal, ô faiseurs d’élégies,
Et, par mon cœur qui saigne averti que j’aimais,
J’ai blanchi bien des nuits des feux de mes bougies,
Mais j’eus cette pudeur de n’en parler jamais.

Parce qu’une amoureuse, un beau soir, est parjure,
Ce n’est point un obstacle à barrer mon chemin :
Des plis de mon manteau je cache ma blessure,
Trop fier pour mendier, du cœur ou de la main.