Page:Bouilhet - Œuvres, 1880.djvu/68

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Et tous deux, sous la bête énorme,
Les doigts crispés au poil tordu,
Têtent sans peur le pis difforme
Que les louveteaux ont mordu.

Courbe, ô figuier, ta large voûte
Sur ce grand berceau des déserts ;
Leur cri faible qu’un monstre écoute
Promet César à l’univers !

Fleuve obscur dont l’eau solitaire
Doit s’enorgueillir tant de fois,
Tibre, où boira toute la terre,
Viens jouer aux pieds de tes rois !

Et toi, par la forêt profonde,
Sous la lune au fauve reflet,
Hurle, ô louve, on noirait un monde
Dans chaque goutte de ton lait !

Ton museau pointu qui grommelle
Domine les peuples tremblants,
Rome tressaille à ta mamelle,
L’avenir vagit sous tes flancs !