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Page:Bouilhet - Œuvres, 1880.djvu/79

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À un jeune homme.


Jeune homme au cœur léger, ne touche point la lyre,
Va demander ta joie aux rêves d’ici-bas.
La pensée est un glaive, et sa pointe déchire
La main de l’imprudent qui ne la connaît pas.

Au temps que Jupiter, de la voûte éthérée
Descendait, à l’odeur de l’hécatombe en feu,
Quelqu’un vit, sur l’autel, dans la coupe dorée,
Un reste de nectar oublié par le dieu.

Cet homme, entre ses doigts, prit la patère sainte,
Et flaira, curieux, le breuvage divin :
C’était un doux parfum de rose et d’hyacinthe,
Plus sucré que le miel et plus fort que le vin.

Il y trempa, sans peur, sa lèvre téméraire ;
Mais il goûtait à peine au liquide immortel,
Qu’il sentit dans son corps circuler le tonnerre,
Et tomba, tout en poudre, aux marches de l’autel !