Page:Bouilhet - Dernières chansons.djvu/18

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au premier venu, léger d’argent, riche d’espoir, — vrai poëte dans le sens classique du mot.

Quand nous nous retrouvâmes, après une séparation de quatre années, il me montra trois pièces considérables.

La première, intitulée le Déluge, exprimait le désespoir d’un amant étreignant sa maîtresse sur les ruines du monde près de s’engloutir :

Entends-tu sur les montagnes
Se heurter les palmiers verts ?
Entends-tu dans les campagnes
Le râle de l’univers ?

Il y avait des longueurs et de l’emphase, mais d’un bout à l’autre un entrain passionné.

Dans la seconde, une satire contre les jésuites, le style, tout différent, était plus ferme :

Ô prêtres de salons, allez sourire aux femmes ;
Dans vos filets dorés prenez ces pauvres âmes !
.....................
Et ministres charmants, au confessionnal
Tournez la pénitence en galant madrigal !
Ah ! vous êtes bien là, héros de l’Évangile,
Parfumant Jésus-Christ des fleurs de votre style
Et faisant chaque jour, martyrs des saintes lois,
Sur des tapis soyeux le chemin de la croix !
.....................
Ces marchands accroupis sur les pieds du Calvaire