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MELÆNIS

» Crois-tu que j’aie un cœur si large ?… cette haine
» Doit en sortir d’abord, pour que l’amour y vienne !
» Tu sais tout : lui vivant, je ne te connais pas !…

» Mais si l’on te disait qu’en baisers de ma bouche
» Je payerai sa blessure et tous ses cris d’effroi !
» Mais si l’on te disait, pour que cela te touche,
» Que cet homme, après tout, est mon maître et mon roi !
» Qu’il veille, gardien sombre, au chevet de ma couche !
» Qu’il faut marcher sur lui pour arriver à moi !

» Que lui mort, nous pouvons nous aimer sans partage,
» Qu’il est de douces nuits, et des jours sans nuage !
» Qu’il serait dur vraiment qu’un autre nous gênât,
» Et que l’amour vaut bien qu’on ose l’attentat !
» — Va, fit Pantabolus, j’accepte le message !
» — Demain ? dit Melænis. — Demain ! » dit le soldat.