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MELÆNIS

» Que mes pleurs ont lavé ma jeunesse frivole,
» Et que ce dernier cri d’une âme qui s’envole
» N’eut pour témoins que toi, le silence et la nuit ! »

Sa voix s’affaiblissait, et son souffle débile
Râlait, comme le vent dans les feuillages morts !
De longs frémissements lui parcouraient le corps ;
Enfin, elle reprit : « S’il cherche par la ville
» Son père, écoute bien, c’est Marcius l’édile !… »
Melænis se dressa comme avec des ressorts.

« Son père !… Marcius !… grands dieux ! l’ai-je entendu ?… »
La sorcière à sa voix se levait par degrés.
« Oh ! fit-elle en ouvrant des yeux démesurés,
» Achève !… — Je ne puis ! — Parle ! — Je t’ai perdue !
» C’est ton fils que j’aimais !… — C’est mon fils que je tue !… »
Elle heurta son front entre ses poings serrés,