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GÉOGRAPHIE ANCIENNE. — N° 1. Le monde connu des anciens. 793

Les races Couchite, Africaine ou Berbère, dominant dans toute l'Egypte, l'Ethiopie, l'Afrique duN. et une partie de l'Espagne dont les habitants primitifs ou Ibères sont probablement un rameau (les Basques en représenteraient aujourd'hui le dernier débris).


La race Tartare, dans une partie de la Scythie et dans la petite Tartane, sans parler de toute la haute Asie, et déjà les avant-postes des Huns au N. de la mer Caspienne.

La race Noire dans le Soudan et les contrées voisines de l'Atlas et du pays des Garamantes.

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CARTE N° 2.

LES PRINCIPAUX SYSTÈMES GÉOGRAPHIQUES DES ANCIENS.

1° Géographie d'Homère.

2° — d'Hérodote.

3° — d'Ératosthènes.

4° — de Ptolémée.

Pour faire comprendre la suite et l'enchaînement des connaissances géographiques des Anciens, nous en suivrons pas à pas les progrès, en les rattachant aux noms des poètes, des historiens et des géographes qui les ont résumés et en quelque sorte personnifiés. Cet exposé ou tableau chronologique est l'Introduction nécessaire de toute étude sur la géographie ancienne.

carte n° 1.

Homère considérait la terre comme un disque entouré par le Fleuve Océan. La Méditerranée partageait la surface de la terre en deux régions : celle de la nuit et celle du jour. Il ne connaît bien que la Grèce, qui est au centre du monde, l'Asie Mineure occidentale, le N. E. de la Libye, Thèbes, le Fleuve Egyptus (Nil), l'Ethiopie, les îles de Crète, Chypre, les Cyclades, les côtes de la Phénicie. Il connaît mal l'Italie, qu'il appelle Hespérie, et la Sicile ou Trinacrie. On ne sait au juste où placer les Cimmériens.

carte n° 2.

Hérodote (ve siècle, et 400 ans après Homère) connaît toute l'Asie occidentale jusqu'à l'Indus ; au N., l'Oxus, la mer Caspienne, le bassin du PontEuxin avec ses fleuves et les Palus-Méotides. Il a des notions exactes sur l'Afrique du nord et même sur quelques régions de l'Intérieur ; il se fait une assez juste idée des contrées de l'Occident, Italie et Ibérie (Espagne), dont il nomme Tartessus. L'Océan environne le monde ; mais on peut faire le tour de l'Afrique ; la côte d'Albion (Angleterre) et les Cassitérides (Sorlingues) ne lui sont par inconnues.

La période qui sépare Hérodote (mort vers 408) d'Ératosthènes (fin du iiie siècle) forme un intervalle de 200 ans, pendant lesquels les connaissances géographiques font de grands progrès. Le Périple de Hannon, faisant connaître les côtes de l'Afrique du côté de l'océan Atlantique, remonte au même temps qu'Hérodote, et ce monument révèle les connaissances des Phéniciens, transmises ensuite aux Grecs, jusqu'au delà de l'embouchure du Sénégal, et probablement jusqu'à l'Ile moderne de Sherboro, près de la pointe de Sierra-Leone. — L'époque du Périple de la mer intérieure, par Scylax, est plus difficile à déterminer. Les uns le croient antérieur à Hérodote, qui parle d'un certain Scylax, chargé par Darius d'étudier les bouches de l'Indus ; mais d'autres le croient contemporain de Polybe. Il est indubitable que le monument primitif a dû être antérieur à Alexandre, peut-être aura-t-il été modifié.

Le célèbre médecin Hippocrate ajouta quelque chose aux connaissances géographiques par ses voyages. L'Expédition des Dix mille donna des notions très-exactes sur l'Arménie et d'autres pays qu'Hérodote n'avait pas visités.

L'Expédition d'Alexandre le Grand (334-323) et les informations recueillies par Aristote tirent faire un pas immense à la géographie. Outre le soin intelligent que le conquérant mit à visiter les pays de l'Orient, la Bactriane, les contrées transoxiennes, le bassin de l'Indus et de ses affluents, on sait que Néarque et Ouésicrite relevèrent toutes les côtes de la mer Erythrée et du golfe Persique depuis l'embouchure de l'Indus jusqu'à Babylone sur l'Euphrate (en 326 avant J. C), et que nous possédons ce précieux monument, ou du moins la rédaction qu'Àrrien en a faite au iie siècle de notre ère, certainement d'après le document original.

carte n° 3.

La tradition des curieuses investigations se trans-


mit d'Alexandre aux Ptolémées. Le commerce ouvert par les Lagides sur le Golfe Arabique et la mer Erythrée (mer des Indes) procura bientôt des notions plus exactes sur cette mer et les pays qu'elle baigne. L'ensemble des connaisances que l'on possédait sur le monde permettait pendant le cours du iue siècle, à Erathosthènes, bibliothécaire d'Alexandrie, de réduire en système la description de la terre en l'établissant, pour la première fois, sur des bases mathématiques. Il avait des idées justes sur la forme de la terre, sur la masse des Océans, sur leurs communications. L'ensemble de ce système, que nous ne connaissons malheureusement que par les longues citations de Strabon, sera expliqué par notre carte n° 3. Taprobane et le Gange étaient connus ainsi que la célèbre Palibothra (auj. Patna). Enfin la Bretagne et l'île de Thule sont les limites occidentales du monde. Les Sères sont déjà nommés ainsi que les Thinœ ou Sinœ (Chinois).


Depuis Eratosthènes, la somme des informations de détail augmentera sensiblement, mais les idées géographiques sur le système du monde, loin de faire des progrès, entreront dans une fausse voie avec Ptolémée lui-même. Mais entre Eratosthènes et Ptolémée, il faut placer un texte dont il ne reste que quelques fragments, c'est un Périple de la Grèce, faussement attribué à Dicéarque.

Agatharcide, qui vivait à Alexandrie sous Ptolémée VI, de 180 à 140, a laissé un ouvrage sur la mer Erythrée.

Le célèbre Hipparque (150-120), le créateur de la cosmographie, est l'auteur de ce fâcheux système suivi par Ptolémée, qui consistait à faire rejoindre la côte orientale de l'Afrique et la côte méridionale de l'Asie, ce qui faisait de la mer Erythrée (mer des Indes) une mer intérieure.

Polybe doit être cité surtout pour sa description des côtes d'Afrique vers l'océan Atlantique.

Arthémidore, dont on possède de rares fragments, vient ajouter quelques indications à celles d'Agatharcide sur les côtes de la mer Erythrée ; il vivait vers l'année 100 avant J. C.

Le fragment d'un poëme géographique, faussement attribué à Scymnus de Chio, nous donne le Périple des côtes occidentales de la Méditerranée, et a été rédigé certainement en Bithynie, sous Nicomède III, de 19 à 76.

Les guerres contre Mithridate donnèrent aux Romains des notions beaucoup plus certaines sur l'Asie.

Posidonius voyagea en Espagne et en Gaule au commencement du premier siècle avant J. C. Son témoignage est souvent cité par Strabon.

L'extension des conquêtes de Rome, en enrichissant de notions nouvelles le domaine de la géographie, permit à Strabon de faire, sous le règne de Tibère, une description du monde, que nous possédons en entier. Entièrement conforme au système d'Eratosthènes, quant à l'ensemble, la géographie de Strabon se distingue par la connaissance des détails et l'agrément de sa composition, à la fois littéraire, historique et géographique.

On sait que le Portique d'Agrippa exposait à tous les regards un Orbis pictus, qui avait eté dressé sous la direction du ministre d'Auguste. C'est à ce document que parait avoir été empruntée en grande partie la géographie de Pline l'Ancien, dans son Histoire naturelle.

Marin de Tyr est du même temps, ainsi que Denys le Périégète, auteur d'un Périple en vers grecs.

A la même époque se rattache aussi Pomponius Mela, qui a écrit sa description de la terre sous l'empereur Claude, et Isidore de Charax, qui fit une description de l'Orient, dont il reste les Stathmesparthiques, sortes d'étapes d'un voyage au delà de l'Euphrate.

Sous les Antonins, Arrien, l'auteur de la Vie d'Alexandre et le conservateur du voyage de Néarque, a, en même temps, laissé un Périple très-précieux du Pont-Euxin.