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enseigna longtemps avec éclat, puis se retira du monde et vécut en ermite. Il avait étudié profondément les écrits d'Aristote et des philosophes arabes qui l'avaient précédé, mais c'était pour les combattre, et il s'annonça comme le Destructeur des philosophes. Le scepticisme apparent qu'il professa n'avait d'autre but que d'établir une sorte de mysticisme et une croyance aveugle au merveilleux. Il a laissé un Traité des principes de la religion, dont les Orientaux font grand cas, et un Abrégé de morale; mais il est plus connu par son traité intitulé : Destruction de la philosophie, où il attaque surtout la doctrine de l'émanation, et qu'Averroës réfuta dans sa Destruction de la Destruction de la philosophie d'Al-Gaxel. On a publié de lui quelques opuscules sous ce titre : Algazelis philosophia et logica, Cologne, 1506, in-4. Plusieurs de ses ouvrages ont été traduits en hébreu.

ALGER, en arabe Al-Gézaïr (c'est-à-dire les Iles), capit. de la prov. d'Alger et de toute l'Algérie, sur la Méditerranée, par 0° 44' de long. E., 36° 47' de lat. N., à 1644 kil. S. de Paris, 800 de Marseille, 750 de Toulon. Sa population, qui avant la conquête était d'env. 50 000 hab., et qui s'était depuis réduite de moitié, s'élève auj. à 80 000 environ. Archevêché, créé en 1848, cour impériale, tribunal de 1re instance et de commerce; académie universitaire, lycée, collége arabe-français, musée, théâtres. Alger tire son nom d'une île placée en face de la côte et jointe au continent par un môle. Elle est de forme à peu près carrée et bâtie en amphithéâtre; les rues arabes sont étroites et sales; les maisons ont de belles terrasses. On remarque l'ancien palais du dey, un grand nombre de mosquées, dont une fut construite par les esclaves chrétiens (1790); le fort l'Empereur, la Kasbah, citadelle située à l'extrémité S. de la ville. Alger a un port artificiel, formé d'un côté par l'île jointe au continent et de l'autre par une jetée. La v. s'est beaucoup embellie et assainie depuis qu'elle appartient aux Français; on y a ouvert plusieurs rues et de belles places, entre autres les rues de Babazoun et Bab-el-Oued, la rue de la Marine, et la place du Gouvernement. Il en part plusieurs chemins de fer. On y fabrique divers objets, tels que : armes à feu, soieries, orfèvrerie, calottes tunisiennes, cuirs, etc. – Alger paraît être situé sur l'emplacement de l’Icosium des anciens, entre Julia Cærsarea (Cherchell) à l'O. et Rusucurium (Dellys) à l'E. Elle ne commence à figurer sous son nom arabe qu'assez tard : elle était en 935 la capit. d'une petite principauté formée par Zeïri, qui avait secoué le joug des califes fatimites; depuis elle subit toutes les révolutions qui bouleversèrent cette partie de l'Afrique. Les Espagnols en furent un instant maîtres (1510-16), mais ils en furent chassés par le célèbre Barberousse. Alger n'a cessé depuis les temps les plus anciens de se livrer à la piraterie; elle était devenue le fléau de l'Europe. Plusieurs tentatives avaient été faites pour faire cesser les brigandages des Algériens (par Charles-Quint, qui y perdit une flotte et une armée en 1541; par Louis XIV, qui bombarda la v. en 1682, 1683 et 1688; par les Anglais qui la bombardèrent en 1816), mais tous ces châtiments étaient restés sans résultat, lorsqu'à la suite d'une insulte faite au consul de France, Charles X arma contre Alger une expédition qui, commandée par le maréchal Bourmont, s'empara de la ville au commencement de juillet 1830. On trouva dans la Kasbah le trésor du dey qui montait à 47 639 010 fr. – Le dép. d'Alger entre ceux d'Oran à l'O. et de Constantine à l'E., a 113 000 kil. carr. et compte env. 800 000 hab., dont le 10e se compose d'Européens. V. ALGÉRIE.

ALGÉRIE, naguère un des grands États des côtes barbaresques sous le nom de Régence d'Alger, auj. la plus importante des colonies françaises, entre l'État de Tunis à l'E. et le Maroc à l'O., bornée au N. par la Méditerranée et au S. par le désert de Sahara, offre une étendue d'environ 850 kil. sur les côtes(de 4° 30' long. O. à 6° 30' long. E.), et s'avance jusqu'à 5 au 600 kil. dans l'intérieur des terres. Elle est divisée en trois grandes prov., celle d'Alger au centre, d'Oran à l'O., de Constantine à l'E., dont le territoire civil forme 3 départements, ayant à leur tête un préfet et subdivisés en s-préfect., savoir : dans le dép. d'Alger, Blidah, Médéah, Milianah; dans le dép. de Constantine, Borie, Philippeville, Guelma, Sétif; dans celui d'Oran, Mostaganem, Mascara et Tlemcen. Le reste du territoire est, dans chaque province, administré par l'autorité militaire. Le pays est peuplé de Maures, de Berbers ou Kabyles, d'Arabes, de Juifs, de Nègres et d'Européens de diverses nations; le tout peut monter à 3 000 000 d'hab., parmi lesquels env. 300 000 Européens. Sous la domination ottomane, ce pays était régi par un dey et se divisait en 4 prov. : les prov. d'Alger et de Titterie au centre, celle de Tlemcen à l'O., de Constantine à l'E.; ces trois dernières étaient gouvernées par des beys soumis au dey; le reste se partageait entre des tribus presque indépendantes. Les princip. v., après Alger, sont Oran, Tlemcen, Bone, Constantine, Bougie, Philippeville. La température y est élevée, mais elle est rafraîchie par les vents de la mer; l'hiver y est fort doux et ne se fait guère sentir que par des pluies abondantes qui durent jusqu'en avril. Le pays est sillonné par les mont. de l'Atlas qui s'élèvent en étages successifs parallèlement aux côtes. On y trouve de nombreuses vallées et plusieurs cours d'eau, dont le principal est le Chélif, dans la partie occidentale viennent ensuite le Mazafran, la Tafna, l'Aratch, l'Hamise, l'Isser, l'Oued-Kébir, la Seibouse. Le territoire est d'une fertilité extrême : c'était sous les Romains le grenier de l'Italie; mais il a été mal cultivé jusqu'à l'occupation française : il produit le blé dur, l'olivier, le chêne vert, le chêne liége, le palmier nain, et au S. de l'Atlas le dattier; on y récolte en abondance les graines oléagineuses, l'opium, la soie, la cochenille, d'excellents tabacs, de très-beaux cotons, etc. On y élève les plus belles races de chevaux et de moutons; mais les forêts renferment beaucoup d'animaux féroces, surtout des lions. On pêche le long des côtes, principalement vers l'extrémité orientale, de très-beau corail : les Français possédaient depuis 1450 des établissements sur la côte pour cette pêche (Borie, le bastion de France, la Calle, etc.). – L'Algérie est formée, à l'E., de la Numidie, et à l'O., des Mauritanies Césarienne et Sitifine des anciens. Après avoir obéi longtemps à des rois indigènes (Micipsa, Jugurtha, Bocchus, Masinissa, Juba, Syphax, etc.), ce pays fut conquis par les Romains, sous lesquels il devint très-florissant, puis par les Vandales, 429, par les Grecs, 534, et enfin par les Arabes, 690. Depuis cette conquête, les Ommiades, les Abbassides, les Aglabites, les Zéirites, les Almoravides, les Almohades, les Mérinites, les chérifs de Haschem, y dominèrent successivement. A la faveur de ces révolutions perpétuelles il s'y forma plusieurs petits États indépendants dont les principaux étaient: Alger, Tenez, Tlemcen et Constantine. Au XVIe siècle, les Espagnols en occupèrent quelques points (Oran et Bougie, en 1506, Alger, en 1509, Tlemcen en 1518); mais les deux frères Barberousse, appelés contre eux par les habitants, enlevèrent Alger à l'Espagne en 1516, conquirent la plus grande partie du territoire qui l'environne, et, pour se mieux maintenir contre leurs ennemis, se reconnurent vassaux de la Porte (1520). Le sultan Sélim y envoya aussitôt un pacha avec un corps de janissaires; mais dans la suite les janissaires, sous le prétexte de se mettre à l'abri des vexations du pacha, obtinrent de la Porte (1600) l'autorisation de choisir dans leur sein un chef chargé de défendre leurs intérêts : on le nomma dey, ce qui veut dire tuteur. L'État fut ainsi pendant quelque temps régi concurremment par un pacha et par un dey; mais ces deux chefs étaient sans cesse en que-