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Page:Bouillet - Chassang - Dictionnaire universel d'histoire-geo - 1878 - P3 - Q-Z.djvu/163

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SCIP
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— 1729 —


scipio veut dire bâton : Macrobe croit que ce surnom fut donné à cette famille parce que son chef servit de bâton de vieillesse à son père aveugle. — L. Cornélius Scipio Barbatus, consul en 298 av. J.-C., prit plusieurs places dans le Samnium et conquit la Lucanie. Son tombeau, trouvé en 1780, et conservé à Rome au musée Pio-Clémentin, est le plus ancien monument sépulcral dont on ait la date et offre l’inscription la plus ancienne qui existe en langue latine. — L. Corn. Scipio, fils du préc., consul en 259, conquit sur les Carthaginois la Corse et la Sardaigne, obtint le triomphe et fut élevé à la censure en 258. Son tombeau a été découvert avec celui de son père. — Cn. Corn. Scipio Asina, deux fois consul (260 et 254), se signala dans son 2e consulat par ses succès en Sicile contre les Carthaginois : il les défit devant Panorme, et leur prit cette ville avec 200 vaisseaux. — P. Corn. Scipio, consul en 218, perdit la bataille du Tésin contre Annibal, y fut blessé et ne dut la vie qu’au dévouement de son fils (Scipion l’Africain). L’année suivante, il fut envoyé, avec le titre de proconsul, en Espagne, où il prit le commandement de l’armée navale et agit de concert avec son frère Cnéus ; il battit d’abord les Carthaginois, prit Castulon et Sagonte; mais, s’étant séparé de Cnéus, il fut défait et périt dans un combat contre Asdrubal (fils de Giscon), 212. — Cn. Corn. Scipio Calvus, frère du préc., joua aussi un rôle important dans la 2e guerre punique. Consul en 222, il fit avec succès la guerre aux Gaulois de la Cisalpine ; puis il passa en Espagne avec le titre de proconsul, et soumit une grande partie du pays. Secondé par Publius, son frère, qui était venu le rejoindre, il battit les Carthaginois en plusieurs rencontres ; mais en 212, s’étant séparé de Publius, il fut comme lui vaincu et tué par Asdrubal : il périt, près d’Anitorgis, 29 jours après la défaite et la mort de son frère. — P. Corn. Scipio, dit Scipion l’Africain et le premier Africain, fils de Publius, né en 235 av. J.-C., sauva la vie à son père blessé au combat du Tésin et servit ensuite en Espagne sous ses ordres et sous ceux de son oncle. Brûlant de venger la mort de son père et de son oncle, qui venaient de périr dans ce pays, il se fit nommer proconsul pour la prov. d’Espagne en 211, bien qu’il n’eût que 24 ans : il débuta par la prise de Carthagène (210), gagna en 209 la victoire décisive de Bétule, où Asdrubal perdit 54 000 hommes, et reconquit toute l’Espagne en quatre ans (210-206). Il se rendit ensuite secrètement en Afrique pour y négocier, et s’y fit des alliés de Syphax et de Massinissa, rois des Numides. De retour en Espagne, il eut à réprimer une sédition de ses troupes et le soulèvement des deux chefs indigènes, Mandonius et Indibilis (V. ces noms). Rappelé en Italie pour combattre Annibal, il fit adopter au sénat, malgré l’opposition de Fabius, le plan qu’il avait conçu de transporter le théâtre de la guerre aux portes de Carthage, fut nommé consul pour exécuter ce projet (205), et fit en peu de temps des progrès si rapides en Afrique que les Carthaginois alarmés rappelèrent Annibal de l’Italie. Scipion remporta sur ce grand général une victoire complète à Zama, contraignit Carthage à demander la paix, et mit ainsi fin à la guerre, 202. Tant d’exploits lui valurent les honneurs du triomphe et le surnom d’Africain ; mais sa hauteur et sa partialité pour les patriciens le rendirent odieux au peuple. Cependant il fut encore consul en 194, puis censeur et enfin prince du sénat. L’an 190, il accompagna son frère Lucius en Asie en qualité de lieutenant, et dirigea dans la réalité toute cette guerre. À son retour il fut, ainsi que son frère, accusé par le tribun Pétilius, à l’instigation de Caton, de s’être laissé corrompre par Antiochus, et se vit cité devant le peuple (187) : au lieu d’entreprendre une apologie, il se contenta de rappeler ses exploits, et l’on ne prononça aucune peine contre lui. Cité de nouveau quelque temps après, il s’écria : « Romains ! c’est à pareil jour que j’ai vaincu Annibal à Zama ; allons au Capitole en rendre grâces aux dieux. » La foule le suivit, et les tribuns ses accusateurs restèrent seuls au milieu de la place publique. Cependant, forcé de comparaître une 3e fois, il fut condamné à l’exil. Il se retira dans sa villa de Literne, en Campanie, et n’y vécut plus que pour les lettres et l’amitié : il admettait le poëte Ennius dans son intimité. Il mourut à Literne en 184 : on dit qu’il voulut que l’on gravât sur son tombeau : Ingrate patrie, tu n’auras pas mes cendres. Ce grand homme réunissait au génie militaire tous les genres de vertus : l'humanité, la tempérance, le désintéressement. Il soumit l’Espagne autant par l’estime qu’il inspirait que par la force de ses armes. Après la prise de Carthagène, une femme d’une grande beauté lui fut amenée par ses soldats ; il fit rechercher un jeune prince nommé Allutius, qui était son fiancé ; et la remit intacte entre ses mains. Cette noble conduite frappa tellement le jeune Espagnol qu’il s’allia aussitôt avec les Romains et fit déclarer ses compatriotes en leur faveur. — L. Corn. Scipio, surnommé l’Asiatique, frère du préc., le suivit en Espagne et en Afrique, fut nommé consul en 190, et battit Antiochus le Grand à Magnésie, avec l’aide de son frère qui lui servait de lieutenant. L’année suivante, il continua la guerre avec non moins de bonheur, et força enfin Antiochus à signer une paix avantageuse aux Romains ; ses victoires lui méritèrent le surnom d’Asiatique. Cependant, à son retour, il fut accusé avec son frère de s’être laissé corrompre par Antiochus, et se vit condamné à une grosse amende (4 millions de sesterces, env. 800 000 fr.). Ses biens, qui furent confisqués, ne purent suffire à la payer, et il fut mis en prison. Dans la suite, on lui rendit la liberté, et les Romains, honteux de leur injustice, le comblèrent de tant de biens qu’il devint un des plus riches citoyens de la république. — P. Corn. Scipio Nasica, fils de Cn. Corn. Scipio Calvus (consul l’an 222 av. J.-C.), et cousin des deux préc., fit avec succès la guerre aux Lusitaniens, 192. L’année suivante, il fut nommé consul et vainquit les Boïens de la Cisalpine. Scipion Nasica était l’un des plus habiles jurisconsultes de son temps. Il devint dans sa vieillesse prince du sénat. — P. Corn. Scipio Nasica Corculum, son fils, se distingua à la bataille de Pydna, 168, fut nommé consul en 155, et vainquit les Dalmates. Celui-ci fut père de P. Corn. Scip. Nasica Sérapion, un des plus implacables ennemis des Gracques, qui fit tuer Tib. Gracchus au milieu de la place publique, l33. — Un petit-fils de ce dernier fut adopté par un membre de la famille Métellus ; il est connu dans l’histoire sous le nom de Métellus Scipio. — P. Corn. Scipio Æmilianus, surnommé le Second Africain, le Numantin, était fils de Paul-Émile, et fut adopté par un fils du grand Scipion. Il eut pour maître l'historien Polybe, et se distingua dès sa première jeunesse par sa valeur, soit en Espagne, où il tua un soldat d’une taille gigantesque, soit en Afrique, où il combattit comme auxiliaire de Massinissa. Le prince numide faisait si grand cas de lui qu’en mourant il le chargea de partager ses États entre ses enfants. Revenu à Rome, Scipion Émilien fut nommé édile en 151, et consul en 147 quoiqu’il n’eût pas encore l’âge voulu. Envoyé aussitôt en Afrique, pour consommer la ruine de Carthage, il pressa le siége de cette place, la prit d’assaut et la rasa après un long siége, et malgré la plus vigoureuse défense, 146. Il reçut à son retour un triomphe, qui dépassa en magnificence tous les précédents. Consul de nouveau en 134, il fut chargé de faire le siége de Numance, que jusque-là les Romains avaient attaquée sans succès : après un an de la résistance la plus opiniâtre, la ville fut prise (133) ; mais Scipion n’y trouva que des ruines. C’est après ces exploits qu’il reçut les surnoms d’Africain et de Numantin. Mais il fut bientôt, comme le premier Africain, en butte à la haine du peuple par suite de son attachement à la cause des patriciens ; il augmenta encore ces sentiments en combattant les lois agraires et approuvant publiquement le meurtre


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