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Page:Bouillet - Chassang - Dictionnaire universel d'histoire-geo - 1878 - P3 - Q-Z.djvu/221

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en faveur de la liberté des hommes de couleur, et fut un des commissaires envoyés en 1792 à St-Domingue par l'Assemblée Législative avec des pouvoirs sans bornes. Il trouva en débarquant au Cap les blancs et les hommes de couleur en guerre, proclama libres les derniers, et bientôt après émancipa les noirs eux-mêmes. Attaqué dans Port-au-Prince par un corps de colons insurgés et par les Anglais, il opposa une héroïque résistance, mais la ville fut prise par trahison, et il revint en France (1793). Renvoyé à St-Domingue par le Directoire (1796), il se fit élire député de la colonie au Conseil des Cinq-Cents : agissant dès lors en dictateur, il donna le commandement en chef des troupes à Toussaint-Louverture, qui bientôt le réduisit à repartir. Il ne reparut plus sur la scène politique après le 18 brumaire.

SOPHÈNE (la), région de l'Arménie, au S. O., fut une des cinq provinces acquises en Orient par les Romains au IIIe s.; Arsamosate en était le chef-lieu.

SOPHIA, Triaditza en bulgare, l’Ulpia Sardica des anc., v. de la Turquie d'Europe (Bulgarie), ch.-l. de livah, sur le Bogana et près des Balkans, entre l'Isker et le Nissava, à 560 kil. O. N. O. de Constantinople; env. 45 000 h. Archevêché grec, évêché catholique; 23 mosquées, etc. Lainages, soieries, tabac, tanneries; eaux thermales. Grand commerce. — Le livah de Sophia, entre ceux de Widdin, Routchouck, Tchirmen, Gallipoli, Ghiustendil et Krouchevatch, répond à une partie de l'anc. Thrace et de l'anc. Mésie.

SOPHIE (Ste). Ce nom désigna d'abord, non une sainte, mais un attribut de Dieu, la Sagesse divine, Hagia Sophia. — L'Église honore une sainte veuve de ce nom, mère de 3 vierges auxquelles elle donna les noms des vertus théologales (Ste Foi, Ste Espérance, Ste Charité), et qui subit le martyre à Rome, avec ses filles, sous Adrien. On les fête le 1er août. Les emp. Justin I et Justinien consacrèrent à Ste Sophie une magnifique basilique, qui était le plus bel édifice de Constantinople. Cette église, inaugurée en 537, subsiste encore : les Turcs en ont fait une mosquée.

SOPHIE, femme de l'empereur Justin II et nièce de Théodora (femme de Justinien), eut beaucoup de part aux affaires sous le règne du faible Justin II et les dirigea fort mal. A la mort de ce prince, elle fit placer sur le trône Tibère Constantin dans l'espoir de l'épouser, puis elle conspira contre lui quand elle vit son espoir trompé; mais elle ne put réussir à le renverser, et fut reléguée dans son palais.

SOPHIE, czarine de Russie, fille d'Alexis Mikhaïlovitch, née en 1656, organisa en 1682, à la mort de son frère Fédor III, la fameuse révolte des Strélitz qui abattit le parti des Narichkin et associa à Pierre le Grand son frère Ivan V, gouverna 7 ans au nom de ses deux jeunes frères de concert avec Galitzin, son favori, fit vainement la guerre aux Turcs, mais fut plus heureuse contre les Polonais, auxquels elle imposa le traité de Moscou (1686). Voyant grandir son frère Pierre et se défiant de son ambition, elle excita contre lui une nouvelle révolte des Strélitz (1689), mais Pierre vint à bout de la comprimer. Dès ce moment, Sophie fut dépouillée de toute autorité et confinée dans une étroite prison; elle y mourut en 1704; on la crut empoisonnée.

SOPHIE-CHARLOTTE, reine de Prusse, né en 1668, m. en 1705, épousa Frédéric I en 1684, protégea les lettres et les sciences, et détermina le roi à fonder l'Académie de Berlin. — Sophie-Dorothée, reine de Prusse, femme de Frédéric-Guillaume I et mère du grand Frédéric, était fille de George I, roi d'Angleterre. C'était une princesse accomplie; néanmoins elle fut fort malheureuse avec son grossier époux.

SOPHIE-DOROTHÉE de Zell, femme de l'électeur George Louis de Hanovre (depuis roi d'Angleterre sous le nom de George I) et mère du roi George II, fut accusée en 1694 d'avoir commis un adultère avec le comte de Kœnigsmark et fut enfermée dans un fort où elle mourut en 1726, après 32 ans de captivité, n'ayant cessé de protester de son innocence.

SOPHIE-WILHELMINE. V. BAYREUTH (la margravine de).

SOPHIS ou SOFIS, c.-à-d. Mystiques, secte musulmane, professe une sorte de déisme ou de panthéisme, n'accepte le Coran que comme livre de morale, repoussant le dogme musulman, et se distingue par une vie ascétique. Elle fut fondée au VIIIe s. de notre ère dans la province persane de Kerman par un certain Abou Saïd-Aboul-Chéir; elle est auj. très-répandue dans la Perse et dans l'Inde. Un des plus célèbres adeptes de cette secte, Azzeddin, né à Jérusalem au XIIe s., a exposé le système des Sophis dans un ouvrage intitulé : Fruits et fleurs, trad. en français par M. Garcin de Tassy, Paris, 1821. Djami a donné la Vie de 611 Sophis (trad. en angl. par Lees, Calcutta, 1859). On doit à Tholuck une savante exposition de leur doctrine: Ssufismus, sive Theologia Persarum pantheistica, Berlin, 1821.

SOPHIS, dynastie persane qui remplaça celle des Turcomans du Mouton-Blanc, commence en 1499, en la personne d'Ismaël, et finit en 1736, en la personne d'Abbas III, renversé du trône par Nadir. Elle a fourni 13 souverains à la Perse (V. PERSE). Son nom lui vient de ce qu'elle descendait d'un Sophi célèbre, Ismaïl, qui avait la réputation d'un saint et à qui, pour ce motif, Tamerlan accorda la vie et la liberté d'un grand nombre de prisonniers. Cet Ismaïl prétendait descendre d'Ali par Mouça, le dernier des imans légitimes.

SOPHISTES. On nommait ainsi chez les Grecs certains rhéteurs et dialecticiens qui enseignaient à prix d'argent l'art de parler et de disputer sur tout, et qui faisaient eux-mêmes profession de soutenir indifféremment sur toute question le pour et le contre. Ils fleurirent pour la plupart dans le Ve siècle av. J.-C. Les plus célèbres sont Gorgias de Léontium, Protagoras d'Abdère, Prodicus de Céos, Hippias d'Elis, Thrasymaque, Polus, Euthydème. Après avoir joui d'une grande vogue en Grèce et dans l'Italie grecque, les Sophistes furent confondus par Socrate, qui détourna ses compatriotes des disputes frivoles pour les ramener à la recherche sincère de la vérité. Platon, dans plusieurs de ses Dialogues, reproduit la polémique de Socrate contre ces corrupteurs de la jeunesse. — Le nom de sophiste, qui, d'après l'étymologie, veut dire ami de la sagesse, s'employa d'abord en bonne part; il ne tomba dans le discrédit que lorsque ceux qui le portaient se furent déshonorés en attaquant les vérités les plus claires ou les plus sacrées. Le nom de sophisme est resté depuis à tout raisonnement captieux.

SOPHOCLE, célèbre poëte tragique grec, naquit vers 495 av. J.-C. au bourg de Colone, près d'Athènes, donna sa 1re pièce en 468, en concurrence avec Eschyle, sur lequel il l'emporta, ne cessa depuis de travailler pour la scène, et fut 20 fois proclamé vainqueur. Il remplit aussi quelques fonctions publiques, fut ambassadeur et même stratège : il commanda en cette qualité une expédition contre Samos. Il vécut jusqu'à près de 90 ans. Devenu vieux, il vit, dit-on, un de ses fils provoquer son interdiction : il n'eut pour se défendre qu'à lire à ses juges un superbe morceau de son Œdipe à Colone, qu'il venait d'achever; ce fait est loin d'être prouvé. L'influence de Sophocle sur l'art dramatique fut immense : il mit jusqu'à trois ou quatre interlocuteurs sur la scène et régularisa la disposition, la conduite, le style de la tragédie : l'épopée, les morceaux lyriques tinrent moins de place, le drame vrai en obtint davantage; en outre, il fit une part bien moins grande à la fatalité et augmenta ainsi l'intérêt. Les anciens attribuaient à Sophocle 123 pièces, mais quelques-unes semblent avoir été de ses disciples. De ces 123, sept seulement nous sont parvenues en entier; toutes sont des tragédies ; ce sont : Philoctète, Antigone, Œdipe roi, Œdipe à Colone, Ajax, Électre, les Trachiniennes. Nous n'avons que les titres et des fragments des autres; 20 ou 22 de ces dernières sont des dra-