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LE VALET SECOURU

droit, qu’après qu’il eut passé dix ans, son maître même n’eût su le détourner de faire une chose qu’il jugeait bonne et raisonnable.


VIII


Un jour, chassant un chevreuil, son maître et lui distancèrent leurs compagnons moins bien montés. Puis le cheval du maître broncha et tomba avec son cavalier sans que l’enfant, emporté à poursuivre la proie, s’en aperçut seulement. Enfin il tua la bête d’une flèche. Il descend, attache le chevreuil en trousse, prend son chien en travers de sa selle ; et, comme il retournait vers ses compagnons inquiets de lui, il rencontra un homme à pied, un beau valet de première barbe, qui menait en main son cheval las et recru, vêtu d’une modeste cotte, ses éperons tout rougis du sang de son roussin épuisé. Voyant l’enfant, le valet baissa la tête, comme honteux ; mais Lancelot lui demanda qui il était et où il allait.

— Beau sire, dit le valet, que Dieu vous donne honneur ! Je suis assez pauvre et le serai plus encore, si Notre Sire ne me protège autrement qu’il a fait jusqu’à présent. Je suis gentilhomme de père et de mère, et je n’en souffre