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MERLIN L’ENCHANTEUR

— Contez-lui ce que vous avez vu, leur conseilla-t-il, et assurez-lui que je lui enseignerai pourquoi sa tour s’écroule toujours.

Ce qu’ils firent ; et le roi émerveillé commanda qu’on lui amenât Merlin. Celui-ci le salua le plus poliment du monde :

— Roi Vortiger, tu veux savoir pourquoi ta tour ne peut tenir ? C’est qu’il y a dessous la terre, à l’endroit où elle s’appuie, deux dragons qui ne voient goutte, l’un roux et l’autre blanc, qui dorment sous deux grandes pierres. Quand ils sentent le poids de la tour, ils se tournent, et elle croule. Si ce que je dis est faux, condamne-moi au feu ; si c’est vrai, accuse tes clercs et tes astronomes qui prétendent connaître tout et ne savent rien.

Aussitôt le roi fit rassembler les ouvriers du pays pour creuser la terre, lesquels travaillèrent si bien qu’on mit à jour les deux grandes pierres qu’avait annoncées Merlin. Et dès qu’on en eut soulevé la première, un dragon blanc apparut, si grand, si fier et si hideux, que tout le monde se hâta de reculer. Puis, sous la seconde, on découvrit un dragon roux, qui sembla encore plus grand et plus sauvage. Et tous deux ne tardèrent pas à s’éveiller et à se jeter l’un sur l’autre, en se déchirant horriblement des dents et des griffes. La bataille dura tout le jour, toute la nuit et le lendemain jusqu’à l’heure de midi. Longtemps le blanc eut le