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AMOUR D’UTER PENDRAGON

qu’Ygerne ne s’y trouvait pas : car elle était demeurée à Tintagel sous la garde de quelques chevaliers dévoués. Que faire ? Lever le siège, il n’y fallait pas songer : ses barons n’eussent pas compris qu’il renonçât à saisir le rebelle… Un jour que le roi se lamentait sous sa tente, Ulfin lui dit :

— Sire, que ne mandez-vous Merlin ?

— Hélas ! répondit le roi, il sait bien que j’ai perdu le boire et le manger, et le dormir, et le repos, et qu’il me faudra mourir d’amour. Pourtant il ne vient pas. Sans doute ne me pardonne-t-il point de vouloir prendre la femme de mon homme lige ; est-ce ma faute, pourtant, si mon cœur ne peut s’arracher d’Ygerne ?

Comme il disait ces mots, Merlin lui-même entra dans la tente. Le roi, plus content qu’on ne saurait dire, le prit dans ses bras et l’accola très doucement.

— Doux ami, dit-il, jamais je ne souhaitai la venue de nul homme autant que la vôtre. Vous savez bien ce que mon cœur désire, puisque je ne vous pourrais mentir que vous ne le connussiez aussitôt.

— Je le sais, dit Merlin, et si vous m’osiez promettre un don, je vous ferais avoir l’amour de la duchesse et coucher avec elle en son lit.

— Ha ! vous pouvez tout me demander !

Alors Merlin lui fit faire un serment sur les meilleures reliques qu’on put trouver ; puis, ils