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Page:Boulenger - Romans de la table ronde II, 1923.djvu/170

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GALEHAUT SIRE DES ÎLES LOINTAINES

après s’être fait reconnaître, il la réconforta de son mieux. Mais elle se jeta à ses pieds en pleurant et en le priant de veiller sur l’honneur du roi et sur le sien, et à la voir ainsi il se mit à pleurer lui-même, car nulle dame ne fut jamais autant aimée des hommes de son seigneur que la reine Guenièvre.

Ce jour donc, messire Yvain prit le commandement au lieu du roi Artus, et Keu le sénéchal porta la grande enseigne, comme c’était son droit. Et le roi Ydier parut sur un cheval bardé de fer, ce qui ne s’était encore jamais vu ; beaucoup de gens l’en jugèrent mal d’abord, qui plus tard agirent tout de même que lui. Il fit aussi porter à ses côtés une riche bannière à ses armes, de cordouan blanc à raies écarlates en drap d’Angleterre : jusqu’alors on ne les avait faites que de cuir ou de drap parce qu’ainsi elles étaient plus solides. Enfin il accomplit de si grands exploits sur son bon cheval, tout le jour, qu’au soir il était tout vermeil de son sang et de celui d’autrui. Et les Saines furent repoussés dans le château. Toutefois ceux de Bretagne ne purent rester sous la Roche en raison des flèches et des carreaux dont les défenseurs les criblaient, et il leur fallut reculer à distance.