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LIONEL AU CŒUR SANS FREIN

Mais Galehaut le reconnut en le voyant passer. Il monta à cheval et fit force d’éperons à sa poursuite, si bien qu’il le rejoignit hors de la ville et saisit sa monture par le frein.

— Qu’y a-t-il, Lionel, lui dit-il, et où allez-vous ainsi ? Vous avez fait grand outrage en ceignant l’épée et en prenant les armes de chevalier quand vous ne l’êtes pas encore.

Et il commanda à l’écuyer du damoisel de rapporter au logis le heaume, l’écu et la lance.

— Allez ! dit Lionel au valet.

Galehaut crut qu’il lui ordonnait de rentrer. Mais le damoisel trancha soudain ses rênes par-dessous sa chape, de façon qu’elles restèrent aux mains de Galehaut ; puis il piqua des éperons et s’élança derrière son écuyer.

— Ha, cœur sans frein ! s’écria Galehaut, il faudrait ici votre cousin : lui seul pourrait vous modérer !

À son tour, le fils de la géante broche son cheval, rattrape Lionel qui ne pouvait diriger le sien, et, grand comme il était, il le prend aux flancs, l’enlève et le jette sur le cou de sa propre monture. Pourtant le damoisel, qui était roide et vigoureux, se débat de telle sorte que les voilà tous deux tombés.

— Pour Dieu, disait Lionel, laissez-moi aller !

— Cela ne peut être.

— Ha ! j’ai grand’peur que messire n’ait