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LA LAIDE PUCELLE


L


La déloyale mit tout en œuvre pour obtenir la bague qu’il portait au doigt, mais, ni par prières, ni par menaces, elle ne put l’avoir. Alors, une nuit, elle lui fit prendre un breuvage qui l’endormit, puis elle lui ôta son anneau et le remplaça par celui qu’elle avait et qui était semblable. Ensuite, elle fit une des plus grandes déloyautés du monde ; écoutez :

Elle envoya une demoiselle à Londres où était le roi Artus, et sachez que cette pucelle était laide de toutes façons. Elle avait le visage et le cou plus gris que fer, les yeux plus rouges que feu, les cheveux plus noirs qu’une plume de corneille, les dents couleur de jaune d’œuf, une seule tresse, qui ressemblait mieux à une queue de rate qu’à rien autre, le nez retroussé, des lèvres d’âne ou de bœuf, de grandes narines tout ouvertes, les jambes courtes et les pieds si crochus qu’elle ne pouvait se tenir aux étriers : aussi chevauchait-elle la cuisse sur le cou de son palefroi, orgueilleusement, tenant haute sa baguette. Ainsi faite et plus hideuse qu’un diable d’enfer, elle avait nom Rosette. Elle s’en vint devant le roi.